Positive Leadership

[FR] Développer le charisme et la résilience (avec le Dr Guila Clara Kessous)

October 19, 2022 Jean-Philippe Courtois Season 4 Episode 4
Positive Leadership
[FR] Développer le charisme et la résilience (avec le Dr Guila Clara Kessous)
Show Notes Transcript

Si le #PositiveLeadership est une science, c’est aussi un art. En effet, comme le grand art, le leadership consiste à donner vie à une vision, à susciter la réflexion et à inspirer l'action.

Je vous invite à découvrir le Dr Guila Clara Kessous, la toute dernière invitée du podcast #PositiveLeadership de JP. À bien des égards, elle est un lien entre les deux mondes.

Nommée comme artiste de l'UNESCO pour la paix en 2012, le Dr Kessous est une militante des droits de l'homme. Elle allie la psychologie positive et des techniques de théâtre pour aider à gagner en charisme et en résilience.

Qu’il s’agisse d’aider les victimes de génocide et de déplacement à surmonter les traumatismes ou d’aider les hauts dirigeants d’entreprise à devenir plus accessibles, nous pouvons tous apprendre de son expérience. 

Écoutez l’épisode complet dès maintenant et n’oubliez pas de vous abonner.

Subscribe now to JP's free monthly newsletter "Positive Leadership and You" on LinkedIn to transform your positive impact today: https://www.linkedin.com/newsletters/positive-leadership-you-6970390170017669121/

Jean Philippe Courtois : Bonjour avant de commencer, je voudrais recommander un podcast « L’Entreprise de Demain » c’est le podcast de celles et ceux qui, aujourd'hui, font et feront le futur du travail pour que, demain, entreprise et impact positif ne fassent qu'un. Il a été créé il y a 4 ans par Delphine Zanelli, agent de transformation et experte en RH et communication.    

  

Avec ces invitées de choix, Delphine partage ainsi des clés d’actions très concrètes pour accélérer la transformation des pratiques managériales et organisationnelles . « L’Entreprise de Demain » par Delphine Zanelli, à retrouver tous les lundis sur toutes vos plateformes de Podcasts !   

  
Guila Clara Kessous :  

Sans le savoir, je renferme en ce moment un système qui va être quelque chose qui est en capacité de me sauver si jamais je prends le temps de l'observer et ça, c'est vrai que c'est assez révolutionnaire. C'est révolutionnaire non seulement par l'optimisation de la performance, mais c'est aussi révolutionnaire vis-à-vis de la santé, 

  

Jean Philippe Courtois :  

 

Bonjour, Je suis Jean Philippe Courtois - JP.  Bien venu sur Positive Leadership - le podcast qui vous aide à vous développer en tant qu'individu, leader, et finalement en tant que citoyen du monde.  

 

L'une des qualités les plus importantes chez un leader est la résilience.  

 

Et pourtant, nous ne consacrons pas assez de temps à parler de ce besoin de résilience dans nos organisations et pour nous-mêmes.  

 

Ce qu'il y a de formidable avec la résilience, c'est qu'elle peut s'apprendre. Alors, quel est le meilleur moyen de muscler notre résilience et notre force intérieure ?  

 

Eh bien, ça va être l'un des propos qu'on va découvrir aujourd'hui avec la doctoresse Guila Clara Kessous, qui a passé des années à étudier pourquoi certaines personnes craquent sous la pression et d'autres, non.   

  

Actrice, enseignante et chercheuse en psychologie positive, elle a travaillé avec des personnes qui ont subi de terribles traumatismes, et son dévouement pour les causes humanitaires lui a value d'être nommée Artiste pour la paix par l'UNESCO.  

 

Je suis particulièrement heureux de la rencontrer et de découvrir les techniques spécifiques qu'elle a élaborées et de voir comment nous pouvons tous nous les approprier dans notre vie. 

 

Un très grand merci Dr Guila Clara Kessous pour être parmi nous dans ce podcast sur le leadership positif.  

  

Guila Clara Kessous : Merci de l'invitation.  

  
  

Jean Philippe Courtois : Pour démarrer, est-ce qu'on peut démarrer tout simplement, j'allais dire avec un petit peu peut-être vos fondations, c'est-à-dire votre enfance et notamment aussi… Votre enfance, ça peut être vos parents, les personnes évidemment qui vous ont aimé, qui vous aiment, qui ont aidé à créer ces fondations et puis aussi votre passion pour le théâtre, je crois qui s'est manifestée assez tôt et comprendre voilà peut-être le pourquoi de ces fondations et le pourquoi de cette passion et est-ce que d'ailleurs c'était une vocation cette passion pour le théâtre ?  
  

   

Guila Clara Kessous : Les fondations, on va dire, elles sont assez simples puisque j'ai eu une enfance assez calme, très tôt avec cette fascination pour la capacité de se réinventer que propose le théâtre. Comme beaucoup de jeunes à l'époque je me cherche et c'est vrai que pour moi le théâtre, cet art protéiforme permet de mourir et de se réveiller et c'est vrai que j'aime avoir cette capacité que je découvrirai plus tard de résilience totale, parce que sur scène comme tout est déjà écrit, tout fait moins peur et la mort aussi. Et c'est vrai que du coup, ça a donné très tôt une volonté de pouvoir essayer l’épreuve du feu et de pouvoir monter sur scène. J'ai commencé à monter sur scène dès l'âge de 11/12 ans…  

  

Jean Philippe Courtois : Oui effectivement…  

  
  

Guila Clara Kessous :… avec une enseignante qui était assez stricte qui me disait que je n'aurais le droit de faire de vraies scènes que lorsque j'aurais réussi à avoir un certain niveau de diction et donc pendant plusieurs années, j'ai passé mon temps à travailler des fables de La Fontaine, des poésies et donc…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : À faire vos gammes de la diction…  
  

  
  

Guila Clara Kessous :… à faire mes gammes exactement. Et c'est donc lorsque je suis arrivée à l'âge de 17 ans, 17/18 ans sur scène avec des pièces de théâtre comme Antigone d’Anouilh…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Des grands classiques.  
  

  
  

Guila Clara Kessous :… ou à quoi rêvent les jeunes filles de Musset où là j'ai vraiment dévoré on va dire le fait de pouvoir avoir le bonheur d'être sur scène et le bonheur aussi d'être traversée par des émotions et d'essayer d'en ressortir, parce qu'un acteur, ça ressort aussi avec différents paliers émotionnels pour revenir à un degré plus calme de la vie.   

 Donc pour moi, la scène a été à la fois un révélateur pour réaliser qu'en fait aujourd'hui quand j'utilise les moyens scéniques pour aider dans le coaching ou dans l'encadrement, c'est plus comme un pis-aller de vie, c'est-à-dire que j'utilise ces techniques, parce que ces techniques m'ont aidée aussi à pouvoir dépasser cette espèce de pas assez de vie que j'avais avec différentes possibilités d'histoires que j'ai pu vivre au travers d'avatars…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Pas dans le métavers ?  
  

  
  

Guila Clara Kessous : Oh, pas si loin que ça ! De toute façon, les comédiens le savent bien, incarner un rôle, c'est dormir avec, vivre avec le temps d'une soirée, d'une tournée, le temps qu'une pièce doit vivre et puis ensuite accepter de voir le rôle glisser et lui dire au revoir. Donc, c'est vrai que pour moi, le théâtre était d'abord une sorte de capacité de trouver une voie jusqu'à ce que je comprenne que la mise en voix des sans voix était pour moi vraiment la carrière que je voulais faire.  

  

Jean Philippe Courtois : Qu'est-ce qui vous a amené à prendre cette décision de dire, finalement le théâtre, c'est une voie pour trouver ma voie, mais moi ce que j'ai envie de faire… J'interprète… C'est d'aller aider les personnes qui ont subi des choses atroces et je vais peut-être pouvoir les aider par le théâtre.  
  

Guila Clara Kessous : En fait, il y a un moment et je pense que ça, c'est dans la carrière de tous les comédiens… Il y a un moment où on sort du conservatoire, on a trouvé sa voie d'une certaine manière et il va falloir ensuite exister, or je trouve que le domaine théâtral est quelque chose d'assez ingrat puisqu'il ne propose au comédien que de dire des mots qui ne sont pas les siens et de faire des gestes qui ne sont pas les siens non plus puisqu'il est quand même régulé par un metteur en scène. Donc du coup l'existence d'un comédien, elle va être assez pauvre à moins justement de travailler un style qui va être un style personnel. Or à un certain moment donné, lorsque je suis sortie du conservatoire, je me suis dit que plutôt que de continuer à porter les textes et de faire une sorte de systèmie esthétique, pourquoi ne pas l'utiliser de façon citoyenne cette approche théâtrale. Et le bien dire devrait être à la portée des sans voix, donc de ceux qui ne savent pas dire.  

 

Et à l'époque j'étais vraiment fascinée par ce qui s'était passé avec Jacques Delcuvellerie, le fantastique spectacle Rwanda 94 et pour moi c'était vraiment la première fois que je voyais un théâtre témoignage sur scène avec de vraies victimes qui parlaient sur scène et j'ai voulu justement continuer cette avancée en essayant de pouvoir proposer une catharsis par le théâtre, donc de la dramathérapie et puis aussi travailler à un meilleur impact contre la désinformation.  
  

   

Jean Philippe Courtois :  

 

L'œuvre dont parle Guilia, Rwanda 94, est une pièce de théâtre incroyablement courageuse et profondément émouvante. Elle combine des récits de témoins oculaires, de la fiction et des dialogues pour tenter de remettre en question et de comprendre le génocide rwandais. Les victimes qui ont pris part à la production l'ont trouvée cathartique. Certaines ont même dit que cela leur a apporté du réconfort. Et pour Guilia, cela lui a permis de réaliser le pouvoir de la thérapie par le théâtre et de comprendre le potentiel des techniques théâtrales pour promouvoir la guérison et développer la croissance personnelle. Et Guilia a estimé qu'il serait vraiment dommage de passer à côté de cette possibilité de la donner aux autres.  

  

  
  

Guila Clara Kessous : Je sais très tôt, j'ai eu cette volonté de pouvoir être utile avec le peu que je savais et justement à l'époque je ne savais encore que ces questions-là de théâtre, ensuite je vais savoir un tout petit peu plus, parce que je vais essayer surtout de bénéficier de lumières de personnes qui m'ont fait rêver, mais à l'époque je me disais déjà qu'il faudrait…  
  

  

Jean Philippe Courtois : Ce que je peux apporter…  
  

  

Guila Clara Kessous : Voilà ! Comment est-ce que je peux apporter et comment est-ce que je peux aider.  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Alors, qu'avez-vous appris au cœur un petit peu de ces souffrances extrêmes, parce que là vous avez quand même été exposée directement à des personnes qui avaient subi des choses incroyables et la capacité de certains d'entre eux à quelque part, transcender cette souffrance pour survivre d'abord et ensuite dans certains cas même, je pense que vous l'avez décrit et on l'a vu dans d'autres cas de figure, un petit peu de personnes incroyables qui ont su développer une formule pour apprécier la vie malgré tout ce qu'ils ont subi de manière atroce et aimer la vie malgré l'insupportable. Est-ce que vous pourriez nous partager peut-être une rencontre avec l'une de ces personnes qui ne vous ont pas simplement touchée, mais qui vous ont montré le chemin finalement de ce qu'était la résilience.  
  

  
  

Guila Clara Kessous : Alors, dans le cadre de l'enregistrement du livre, Ma Mère m'a tué, de Albert Nsengimana, j'ai eu la chance de pouvoir rencontrer d'autres survivants du Rwanda et de travailler avec eux. Il y a eu une femme en particulier qui m'a beaucoup touchée. Elle a travaillé sur un texte que je lui avais proposé qui était un texte qui était un monologue issu de Shakespeare, on l'avait choisi ensemble.   

 

Et c'est vrai que ce qui était absolument fascinant, c'était de voir comment est-ce qu'à un certain moment donné, l'abandon de soi, le lâcher-prise faisait que tout ce qui était dit dans ce monologue était utilisé comme si c'était elle qui revendiquait les choses.   

C'était quelque chose d'assez bluffant de voir comment le corps tout d'un coup arrivait à vraiment sortir toute la puissance en fait qui avait été brisée et comment est-ce que finalement l'intégrité revenait dans une noblesse qui avait été peut-être perdue jusque là et c'est ça aussi la puissance du rôle.   

 

La puissance du rôle c'est vraiment permettre à la personne d'endosser le manteau d'une reine en l'occurrence et de pouvoir montrer à l'humanité le temps de quelques minutes ce qu'elle a perdu ou ce qu'elle n'a pas voulu voir. Moi, elle m'a beaucoup touché non seulement dans la puissance de son évocation, mais dans la capacité qu'elle a eu ensuite à pouvoir me dire qu'elle continuait d'apprécier la vie et c'est vrai que si jamais on met bout à bout des survivants du Rwanda avec qui j'ai travaillé ou des personnes déplacées Rohingyas du Bangladesh ou des survivants de la Shoah, ce qui m'a vraiment le plus fasciné, c'était cette capacité de pouvoir simplement, même ne pas se poser la question de savoir si on était heureux, parce qu'on n'a pas le choix et donc le degré de bonheur, de psychologie positive n'est plus à quantifier, parce qu'en fait, on n'est pas dans la question de savoir si oui ou non. Comme on est dans la survie, la survie suppose quelque chose qui va aller de mieux en mieux, donc une sorte de promesse d'espoir…  
  

Jean Philippe Courtois : D'espoir…  
  

  
  

Guila Clara Kessous : Oui, éternelle.  

  

   

Jean Philippe Courtois : Que tout ce qui va venir sera meilleur…  

  
  

Guila Clara Kessous : Oui.  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Et en bâtissant un petit peu cette discussion, Guila, je sais que vous avez eu ce plaisir aussi de travailler aux côtés d'Élie Wiesel, prix Nobel de la paix et qui a eu je pense que influence forte sur vos premiers travaux. Qu'est-ce que vous avez appris en travaillant à ses côtés, sur son travail, mais aussi à nouveau sur la façon dont une victime peut changer de statut et endosser j'allais dire un rôle de leader positif et montrer l'exemple à bien d'autres qui ont de toutes petites misères dans leur vie et qui peuvent s'inspirer de tels "role models" comme diraient les Américains… "role models", je suis désolé, en français, c'est toujours difficile à traduire, mais d'une telle exemplarité finalement ?  
  
  

Guila Clara Kessous : Ce que j'ai appris aux côtés d'Élie Wiesel, c'est vraiment le sens de l'humilité. C'est vraiment quelqu'un qui lorsqu'on venait dans son bureau en tant qu'élève… Moi j'étais son élève de doctorat, donc j'allais à ses heures de bureau assez régulièrement, c'est quelqu'un qui s'asseyait à la table et qui vous disait très souvent, racontez-moi. Et je me rappelle la première fois que je l'ai vu, il y a eu ce moment de silence, de regard, moi qui attendait bien sûr avec le stylo prêt à noter chacune des paroles du maître…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Du maître…  

  
  

Guila Clara Kessous : Et lui qui me regarde avec bienveillance et qui me dit simplement racontez-moi.  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : J'écoute !  
  

  
  

Guila Clara Kessous : Voilà ! Donc cette espèce là aussi de changement de rôle du maître et de l'élève avec ce qu'on appelle aujourd'hui un peu les conférences inversées. C'était vraiment ça le style Élie Wiesel. J'ai aussi appris un énorme courage avec quelqu'un qui ne se soustrait pas vis-à-vis de ses responsabilités. C'est vraiment quelqu'un qui avait la capacité aussi de prendre sur ses épaules, de pouvoir parler non seulement de ce qui lui était arrivé en termes d'atrocité, mais de pouvoir aussi avoir une certaine union dans cette idée de victime et de partir sur le terrain. C'est quelqu'un qui est parti à Sarayevo, c'est quelqu'un qui s'est aussi mobilisé sur le Rwanda, c'est vraiment quelqu'un qui n'hésitait pas à pouvoir parler à l'oreille des présidents pour leur rappeler que le pouvoir c'est une chose, mais que les sans voix ça en est une autre, les invisibles, ça en est une autre et que le pouvoir ne suppose pas d'écraser l'autre, au contraire.  

  

Jean Philippe Courtois : Au contraire, c'est de rendre visibles les invisibles et de donner la voix à ces sans-voix. On sent qu'il y a plusieurs signaux qui convergent sur ces invisibles et pour poursuivre un petit peu sur ce travail de doctorat que vous avez fait avec Harvard et notamment une rencontre qui je crois a été assez capitale quand même aussi avec Tal Ben-Shahar sur le bonheur et qui a un moment, je crois, vous avez décidé de vous réinventer… C'est moi qui utilise le mot, je ne sais pas si c'est ça… Réinventer, de changer de direction en devenant notamment, pas seulement, coach et en allant travailler ensuite avec des dirigeants d'entreprise, des cadres, c'est-à-dire un public complètement différent, d'abord de celui du théâtre dont on a parlé et puis de l'humanitaire aussi.   

 

Donc, qu'est-ce qui vous a si profondément marquée, le fameux déclic dont on parle souvent dans certains moments de notre vie en écoutant à un moment donné Tal Ben-Shahar parler ?  
  

  
  

Guila Clara Kessous : Lorsque j'arrive à Harvard Université, c'est pour enseigner le cours théâtre et droit de l'homme. J'y suis invitée et je suis très heureuse même si au fond, je suis profondément malheureuse puisqu'à force d'écouter les témoignages, de les recueillir, de travailler à la mise en voix de l'atrocité, j'ai beaucoup de mal, et vous l'avez dit vous-même, je n'avais pas les clés, je n'avais pas les armes non plus de psychologie positive pour tenir.   

Beaucoup de personnes d'ailleurs sont comme ça, dans leur volonté de don, il y a un côté un peu sacrificiel et donc ils s'oublient et c'est vrai que lorsque je suis arrivée à Harvard Université, j'étais très proche du burnout. Quand on est à Harvard, on peut prendre n'importe quel cours et donc en feuilletant le catalogue, je vois ce cours sur le bonheur et en bonne Française, je me dis, attendons-nous à être déçu.  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Parce que c'est les Américains quoi, c'est ça qui vont nous raconter…  
  

  
  

Guila Clara Kessous : Voilà ! Ils vont nous raconter le Colgate avec les grands sourires dents blanches…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Everything is great!  

  
  

Guila Clara Kessous : Exactly! Donc, je suis les cours et non seulement je suis éblouie, mais je suis guérie, c'est-à-dire que j'ai appris des armes pour pouvoir me préserver et encore une fois, mieux tendre la main parce que les personnes qui veulent faire don d'elle-même oublient que quand on est par terre, on ne peut pas aider les gens à se relever donc il faut avoir un minimum de posture debout qui suppose une vraie conscience de distanciation avec la victime. Ça, c'est vraiment quelque chose de très important. Donc, Tal Ben-Shahar m'apprend ça, il apprend dans la psychologie positive à pouvoir se préserver, à pouvoir prendre de la distance, à pouvoir mettre en place aussi des systèmes de défense qui sont très importants et à la fin du cours, je vais le voir en le remerciant profondément et en lui disant que pour moi, même si j'y ai trouvé mon compte, ça manque d'incarnation, il manque un côté d'implication corporelle. En tant que comédienne, je lui dis que ça serait intéressant de pouvoir…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Conjuger les deux…  
  

  
  

Guila Clara Kessous :… conjuguer les deux. Et là, il me met au défi et me propose de pouvoir imaginer 5 minutes d'exercices mêlant théâtre et psychologie positive et comme il devait faire une conférence le mois prochain devant un parterre assez important, il me dit je te laisse…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Monter sur scène…  

  
  

Guila Clara Kessous :… Monter sur scène. Et donc, je me creuse les méninges et du coup je fais quelque chose, ça lui plaît, ça plaît au public et il me dit, bon on essaye de refaire ça le mois prochain avec une assemblée encore plus grande, je te laisse 10 minutes et donc petit à petit…  

  

Jean Philippe Courtois : C'était quoi, si je peux me permettre, ce que vous avez improvisé, enfin, pas improvisé, vous l'avez préparé…  

  
  

Guila Clara Kessous : Bien sûr…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois :… Si on peut se le représenter, c'est pas facile, parce que c'est très physique aussi…  

  
  

Guila Clara Kessous : Alors, ça allait de plusieurs exercices qui allaient à la fois sur quelque chose simplement de l’ordre de la détente corporelle, mais immédiate, c'est des choses comme de la pluie énergétique, c'est des choses comme de la prise de conscience du rapport qu'on peut avoir à l'autre lorsqu'on se tourne vers la personne et que l'on voit si la personne est disposée ou pas avec ce que moi j'appelle le sourire du visage. Pour nos auditeurs par exemple, qu'est-ce que c'est que le sourire du visage… Ça n'a l'air de rien, et pourtant en fait, c'est quelque chose qui est fondamental dans le rapport à l'autre. Je vais être un petit peu plus explicite. Pour réussir cet exercice, prenez un miroir, lorsque vous êtes devant le miroir, essayez de regarder votre visage le plus détendu possible et vous allez voir que si vous êtes complètement détendu, les joues vont aller relativement vers le bas, le visage va avoir l'air assez tiré et en fait une personne si jamais elle vous voit ainsi, aura l'impression de vous déranger. Le sourire du visage, c'est justement essayer de comprendre que ce n'est pas parce que vous allez forcer votre visage à avoir les lèvres qui remontent que vous allez donner une idée de disponibilité à votre public…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Que vous serez accueillant…  

  
  

  

Guila Clara Kessous :… Que vous serez accueillant. Le vrai travail, ça vient du haut du visage, du fameux masque… Et le haut du visage suppose de mettre de la tension pour montrer de l'attention. C'est la différence entre un visage qui est relâché et un visage qui est ouvert. Donc ça, c'est vraiment… En fait, pour réussir à avoir un visage ouvert, mettez vos mains sur les joues, remontez légèrement vers les tempes et lissez le front. Et vous allez voir, c'est cette espèce de… Ce qu'on appelle le charisme, la présence. Vous allez voir qu'il y a une sorte de microparticule d'énergie qui va se développer du visage…  

  
  

  

Jean Philippe Courtois : Qui va commencer à se diffuser…  

  

  
  

Guila Clara Kessous :… Qui commence à se diffuser. Et on le voit par rapport à cette conscience que l'on a lorsqu'un personnage rentre en scène. Si jamais le héros ou le comédien a pu faire ce geste-là de remontée vers les tempes et puis lisser le front, il y a quelque chose qui va se dégager vraiment au niveau énergétique.   

Et une personne qui va venir vous voir, si jamais vous réussissez à activer ces zones en le regardant, en lui disant, oui je t'écoute, va être plus enclin à rentrer en relation avec vous.  

 

Jean Philippe Courtois : Je vous recommande vivement de prendre le temps de vous placer devant un miroir et d'essayer cet exercice. Il est incroyable de constater à quel point un petit changement dans l'expression de notre visage peut faire une différence dans notre façon d'être abordable et dans le type d'énergie que nous transmettons aux autres. Souvent, lorsque nous réfléchissons à la manière d'améliorer notre communication, si nous y pensons, nous nous concentrons sur notre voix. Ce que nous disons et comment nous le disons - mais nos expressions faciales sont cruciales, et l'exercice de Guilia est un excellent moyen d'attirer votre attention sur ce point. 

 

Guila Clara Kessous : Et c'est vrai que c'est quelque chose qui est assez bluffant à faire. Et donc, du coup, c'est comme ça que Tal Ben-Shahar m'a dit, tu sais les techniques que tu proposes, c'est des techniques de coaching, si tu veux vraiment avoir un changement sociétal, il faut que tu le fasses par l'institution, par le collectif, par l'entreprise et il m'a dit de pouvoir me former au coaching en entreprise. 

  
  

Jean Philippe Courtois : Non, mais c'est super d'avoir pu exprimer ça. Alors, moi j'ai le plaisir de voir votre visage au moment où vous parliez de cette expérience que vous avez dû mener devant ce grand auditoire, mais évidemment par la voix on ne retransmet pas tout même si je pense qu'il y a des tonalités de voix aussi avec lesquelles on va réagir de manière extrêmement différente évidemment, mais ça, on en reparlera peut-être tout à l'heure.   

 

Je voulais revenir peut-être, Guila, sur la psychologie positive, vous en parlez déjà évidemment depuis un petit moment. Dans le podcast, Guila, j'ai eu le plaisir de recevoir des personnes que… Kim Cameron, Audrey Tang et Barbara Fredrickson et donc on a passé un très très bon moment évidemment.   

Pour nos auditeurs qui ne connaissent pas, ce sont des auteurs et des chercheurs en psychologie positive, donc qui ont fait des travaux et continuent de manière incroyable. Donc, moi, j'ai une question très concrète à vous poser. Selon vous, est-ce que la psychologie positive est une science de l'humain ?  Ou est-ce que c'est une branche de la psychologie elle-même ? Et selon la réponse, quelles sont les implications pour bien comprendre l'importance de la psychologie positive et quoi en attendre finalement ?  


Guila Clara Kessous : Alors, moi je serais plus sur le côté science de l'humain, parce que pour moi la psychologie positive n'est pas de la psychologie.   

Le principe même de la psychologie, c'est quand même d'essayer de comprendre d'où vient le mal avec une idée du pourquoi qui va être radicale.   

Le but de la psychologie, c'est vraiment de chercher la source et la plupart du temps la trouver dans l'inconscient, dans la petite enfance, dans l'éducation, dans des prismes, on va dire, qui vont être établi depuis la naissance de l'individu. La psychologie positive prend et vous le savez bien, l'individu [INDISCERNIBLE] ici et maintenant pour essayer de lui faire non pas répondre à la question du pourquoi, mais du comment aller mieux. Et donc à partir de là pour moi cette science de l'humain, c'est même en termes scientifiques une capacité de prendre en considération les ressources propres de l'humain avec une optimalisation de cette espèce de système immunitaire inné.   

On va donc ne pas demander à l'individu d'essayer de savoir pourquoi il va mal, de trouver la racine du mal, mais essayer de lui faire comprendre, OK jusqu'à présent, voilà comment tu as fonctionné, aujourd'hui, il y a dysfonctionnement, bien sûr selon le degré de gravité, la psychologie positive ne va pas répondre à des pathologies.   

Voilà le dysfonctionnement, qu'est-ce que tu peux utiliser en conscience de ce que tu utilisais avant pour faire en sorte de dépasser ça et du coup, c'est en cela que la psychologie positive va être incroyable, vous parliez d'implication, mais pour la résilience…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : C'est sûr.  

  
  

Guila Clara Kessous :… Puisqu'en fait, ça va permettre à la personne d'ouvrir les yeux sur sa systémie, c'est-à-dire de ne plus faire semblant qu'aller bien, c'est quelque chose en fait de, comment dirais-je… NA, vous savez non intéressant…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Oui, non intéressant…  

  
  

Guila Clara Kessous :… admis…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Pas pertinent…  

  
  

Guila Clara Kessous : Voilà, pas pertinent. Donc, aller bien, qu'est-ce que ça veut dire pour la personne ? Qu’elles sont ses ressources, quelles sont ses capacités ? Et comment optimiser sa performance ? 

  

 

Jean Philippe Courtois : Alors ce que j'aimerais qu'on fasse un tout petit peu maintenant Guila, c'est peut-être parler comme vous l'avez fait, qui est fantastique pour nos auditeurs, un peu de quelques techniques que vous avez largement éprouvées et utilisées avec des publics très différents. Et quels sont les comportements essentiels que nos auditeurs devraient adopter s'ils devenaient des positifs réalistes ?  

  
  

Guila Clara Kessous : Alors, il y a un exercice que l'on fait d'ailleurs en classe avec Tal Ben-Shahar, c'est un exercice qu'on appelle l'exercice du spire, spire en anglais qui veut dire spirale, le spire, c'est en fait, une façon de prendre sa propre température pour savoir si tout va bien et encore une fois, il faut dépasser l’idée qu'on peut imaginer qu'est le bonheur, c'est-à-dire un état de joie un peu naïve, mais vraiment un état d'optimalisation de soi. C'est vraiment ça le bonheur dans la psychologie positive, c'est comment faire pour que toutes mes facultés mentales et physiques soient à jour, soient le mieux exploitées. Ça ne veut pas dire qu'à l'heure où je vous parle, je suis peut-être forcément à 10/10 de joie.   

 

Alors, je le suis quand même, parce que c'est vrai que c'est très plaisant de pouvoir être avec vous, mais malgré ce 9/10 on va dire, mes capacités sont bien utilisées, donc il y a une bonne rentabilité en termes systémiques. Donc, pour vérifier ça, Tal Ben-Shahar nous disait de prendre cette température à peu près 3 fois par semaine au tout début, idéalement à la même heure, idéalement dans le même cadre, donc dans le même lieu, et d'essayer de s'évaluer de 1, 1 étant la note la plus basse à 10, 10 étant la note la plus haute sur différentes dimensions et justement ces différentes dimensions vont créer l'acronyme spire. Alors, bien sûr, la première dimension de spire, ça va être la dimension qui va être spirituelle. La dimension spirituelle, attention ça n'a rien à voir avec un côté religieux, c'est est-ce que ce que je suis en train de vivre lorsque je m'isole, que je prends un peu de temps pour réfléchir, est-ce que ce que je suis en train de vivre me donne un sens profond…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : me nourrit…  

  
  

Guila Clara Kessous : Me nourrit… exactement, mais me nourrit vis-à-vis de ma place dans le monde…  

  

  

Jean Philippe Courtois :… dans le monde…  

  
  

Guila Clara Kessous : Ensuite, deuxième lettre, le P, c'est physique, est-ce que je peux prendre un tout petit moment pour commencer à essayer de me donner une note de 1 à 10 et savoir comment je vais. Est-ce que si soudain, lorsque je prends un tout petit peu de temps de réflexion, je réalise que ça commence à faire mal dans le dos…  
  

  
  

Jean Philippe Courtois : Dans le dos, dans la nuque…  

  
  

Guila Clara Kessous : Dans le dos, dans la nuque, j'ai une vieille blessure qui se réveille que je fais taire tout le temps par l'action. Donc ce moment-là de réflexion physique, il est extrêmement important. Pourquoi ? En imaginant que j'ai sous la moyenne… Alors bien sûr, l'idéal, c'est de toujours noter pourquoi on s'est donné cette note… Si jamais je me mets 4 et que je me retrouve à me redonner 4 deux jours plus tard et encore 4, il faut vraiment traiter.   

Ça veut dire en fait, exactement, qu'il y a quelque chose là qui est masqué et qu'il faut je puisse vraiment prendre en considération. Donc ça, c'est le P qui est dans le côté physique.  

 

Le I de spire, c'est intellectuel. Est-ce que j'apprends quelque chose, est-ce que je me nourris en ce moment ou alors est-ce que j'ai l'impression de m'étioler, que je m'ennuie, que je ressasse, je répète, exactement. Là aussi, si jamais on est sous la moyenne quand on répète la température, voir comment traiter. Le R, c'est relationnel et là bien entendu, quand on était en plein confinement, le R était quelque chose terrible…  

  
  

Jean Philippe Courtois : Très très dur.  

  

Guila Clara Kessous :… De 1 sur 10 exactement. Est-ce que je me sens soutenu, est-ce que je me sens entouré. Ça n'a pas à être la personne hyper populaire, mais ça à être vraiment une conscience de pouvoir être en relation avec les siens, avec ceux avec qui on veut partager, etc. Et puis le E, c'est émotionnel. Et l'émotionnel, c'est vraiment comment est-ce que je peux me noter au niveau émotionnel entre 1 et 10, le 1 étant des émotions qui vont être des émotions qui vont être difficiles à vivre, est-ce que je suis souvent en colère, est-ce que j'ai beaucoup de frustrations. Au-dessus de la moyenne, ça va être assez satisfait dans la volonté, dans l'élan de pouvoir découvrir d'autres choses. Donc, vraiment, c'est plus essayer de bien sûr découvrir quelque chose qui serait de l'ordre de la dépression ou alors de schémas émotionnels qui reviennent.  

  
  

Jean Philippe Courtois :… des patterns…  

  
  

Guila Clara Kessous : Des patterns, exactement. Et donc, ce spire, quand on est intéressé à pouvoir appliquer la psychologie positive, on peut le faire rien qu'une fois par semaine et essayer de tenir un carnet et prendre à la fin du mois un moment pour se dire, ah, mais c'est fou, tel jour, j'ai dit ça, c'est exactement la même chose que ce que je dis 3 semaines plus tard. Donc, en fait, il y a quelque chose en termes de curiosité intellectuelle qu'il faut absolument que je soigne. Et ça, c'est vraiment quelque chose qui permet une façon vous savez comme on dit en anglais de whole being, la difficulté de traduction en français, c'est vraiment la façon de prendre en considération le tout de l'être humain qui est assez remarquable je trouve.  

  
  

Jean Philippe Courtois : Comme le dit Guila, l'avantage de cette technique et qu'elle vous aide à voir plus clairement comment vous allez, comment vous allez vraiment dans chaque aspect de la vie spirituelle, physique, intellectuelle, relationnelle et émotionnelle. Passez juste quelques minutes à vérifier ces aspects trois fois par semaine, de manière structurée. Vous verrez que ça va vous aider à progresser. Cela vous permet d'apprécier ce qui fonctionne vraiment et d'identifier aussi les domaines que vous devez aborder en pleine conscience. Je peux vous dire que je vais vraiment essayer moi aussi. Alors pourquoi essayez vous pas également et faites moi savoir comment vous en sortez ? 

 

  

Je sais que vous avez aussi formé… vous faites toujours je crois des CEO notamment et d'autres dirigeants… un modèle de communication dont vous avez parlé quelques fois basé sur 5 piliers, je crois.   

Est-ce que vous pouvez nous en parler ? J'avais pas mal parlé avec Kim Cameron de la communication positive aussi, je ne sais pas si c'est aligné ou pas avec le modèle de Kim Cameron, mais c'est quoi un petit peu ces 5 piliers ?  

  
  

Guila Clara Kessous : Alors, les 5 piliers que j'utilise sont les suivants : ancrage, qui reprend en fait le postural, comment est-ce que la personne se tient face à son auditoire. Bien entendu, ces questions posturales sont importantes tant en présentiel qu'en distanciel. Pourquoi ? Parce qu'en fait, c'est ce que votre auditoire verra en premier.  

  
  

Jean Philippe Courtois : Il va ressentir, oui…  

  
  

Guila Clara Kessous : Immédiatement en fait, un auditoire regarde si la personne est capable de pouvoir tenir au sol.  

  
  

Jean Philippe Courtois : D'ancrer.  

  
  

Guila Clara Kessous : D'ancrer. Et c'est vraiment la façon dont la personne se déplace et gère son poids de corps qui va donner une notion de légitimité ou pas à l'observateur. C'est assez fou…  

  
  

Jean Philippe Courtois : C'est immédiat…  

  
  

Guila Clara Kessous : Ah, c'est immédiat !  

  
  

Jean Philippe Courtois : Quand on rentre sur une scène, on le sent…  

  

  

Guila Clara Kessous : Exactement. Mais on le voit même…  

  
  

Jean Philippe Courtois : On doit prendre la parole, etc.  

  
  

Guila Clara Kessous : Et quand on fait partie d'un jury et qu'on est dans l'écoute d'une personne qui va venir présenter son CV, la façon dont la personne va marcher sur la pointe des pieds, fermer avec mille précautions la porte, ne pas faire de bruit pour ne pas faire grincer la chaise. Immédiatement, en fait, ça va décribiliser la personne alors que c'est une personne qui peut très bien être vraiment très douée.  

  
  

Jean Philippe Courtois : Alors, ça, c'est le premier pilier.  

  
  

Guila Clara Kessous : Ça, c'est le premier pilier. C'est vraiment l'ancrage. Deuxième pilier, la gestuelle. Alors, le fameux qu'est-ce que je fais de mes mains. Qu'est-ce que je l'ai entendu ça. Qu'est-ce que je fais de mes mains ? Alors, la gestuelle qui n'est pas à négliger non plus en digital.   

Beaucoup de personnes se disent, ah, je peux très bien cacher mes mains. Oui, vous pouvez cacher vos mains en digital, mais qu'est-ce qu'on verra ? Votre faciès. Donc, on verra les mimiques faciales et ça les mimiques faciales…  

  
  

Jean Philippe Courtois : Ça ne pardonne pas des fois.  

  
  

Guila Clara Kessous : Ah, elles peuvent vraiment vous jouer des tours les mimiques faciales. Donc, c'est pour ça que je dis toujours un tout petit peu de gestes sans en faire trop seront les bienvenus. Troisième pilier, le regard. Savoir regarder, c'est savoir écouter, parce qu'on écoute par les yeux. Je vous donne un exemple, quelqu'un toque à la porte, vous demande de pouvoir l'écouter, si jamais vous ne le regardez pas, alors que vous êtes capable de l'écouter sans le regarder, la personne ne pensera pas que vous l'écoutez.   

  
  

Jean Philippe Courtois : Complètement.  

  
  

Guila Clara Kessous : C'est ça. Donc, on écoute vraiment par les yeux. Donc, le regard est capital et j'irai même plus loin, on respecte par les yeux. Donc selon la culture, là aussi c'est des choses qu'il faut sentir, être en capacité de savoir est-ce que je plonge dans les yeux de mon interlocuteur, est-ce que je pars, est-ce que j'ose regarder, dans certaines cultures si je ne regarde pas les personnes vont penser que je mens, que je dissimule, que je manipule.   

Si au contraire, je regarde de façon trop insistante, pour certaines cultures ça sera une déclaration de guerre. Donc là aussi, le regard, ce sont des choses très importantes.   

Et les deux derniers piliers, ce sont des piliers qui touchent le paraverbal, c'est la voix et le silence. Je rappelle qu'en communication, seuls 7 % de ce qui est dit a un impact, le reste c'est du non verbal et du paraverbal. Ça ce sont les chiffres d'Albert. Alors, bien sûr, il y a des choses qu'on peut un petit peu nuancer, mais c'est vrai que le non verbal reste quand même très important en communication.  

  
  

Jean Philippe Courtois : C'est quand même extrêmement complet, extrêmement aussi parlant j'allais dire d'arriver un petit peu à comprendre les pouvoirs qu'on a avec notre corps tout simplement et de savoir les exprimer et de savoir mieux les maîtriser. Alors, vraiment, parce que c'est difficile, j'ai tellement de questions, mais il va falloir qu’on arrive à une fin.   

Juste avant-dernière question peut-être, il y a un [INDISCERNIBLE] très remarquable chez les gens qui font preuve de résilience après un traumatisme, c'est leur détermination. Il y a quelque chose que vous avez dit dont le terme qui le décrivait le mieux était le fameux concept japonais d'Ikigai.   

Est-ce que vous pourriez nous expliquer en quoi il est important ce concept ?  

  
  

Guila Clara Kessous : Alors, le concept d'Ikigai, il va aider à pouvoir permettre à la personne de se situer.   

Pour moi, l'Ikigai, c'est un petit peu comme une boussole qui va vous aider à révéler votre raison d'être, votre valeur profonde au monde. L'Ikigai, c'est un concept japonais qui veut dire bonheur, mais plus équilibre si vous voulez qui propose 4 sphères qui s'interpénètrent avec en fait tout simplement 4 questions très simples, la première c'est qu'est-ce que j'aime faire ?   

Et je sais qu'il y a certains dirigeants lorsque je pose la question, me regarde en me disant, mais je ne me suis jamais posé la question de savoir ce que j'aime faire. C'est vraiment la question qui est la plus difficile.   

La deuxième question, c'est en quoi je suis doué ? Qu'est-ce que je fais naturellement bien. Et encore une fois sans se censurer.   

La troisième question, c'est pourquoi je suis payé ? Et ça, c'est très intéressant, parce que quelques fois on se dit, je suis payé pour faire du phoning, des agrafes, de faire des tableaux Excel, de faire de l’ingénierie pédagogique…   

Donc quand on liste, on se dit, tiens, c'est un peu différent de ce que j'aime faire.   

Et là déjà en termes de dissonance, ça peut commencer à vouloir dire quelque chose. Et puis la dernière chose, c'est qu'est-ce que je fais dans un cadre qui me dépasse, qui est plus grand que moi pour les besoins du monde ?   

Alors, là aussi, j'ai généralement des personnes un peu dubitatives en me disant, mes les besoins du monde, moi je suis une une petite goutte dans l'océan… Mais il faut vraiment voir ça d'un point de vue, plus d'héritage, qu'est-ce que je laisse derrière moi. Et là, ça peut très bien être l'éducation que je fais des enfants, ça peut être le système associatif que je soutiens, ça peut être les initiatives humanitaires que je peux faire. Et c'est très intéressant, parce que pour certaines personnes cette 4e sphère, elle va devenir intéressante proche de la retraite où là, la personne va se dire, mais tiens, qu'est-ce que je laisse derrière moi ? Vite, vite…  

  
  

Jean Philippe Courtois : Il est temps !  

  
  

Guila Clara Kessous :… Essayons de voir ce que je peux trouver qui soit…  

  
  

Jean Philippe Courtois : Quelle sera mon épitaphe ?  

  
  

Guila Clara Kessous : Exactement… En lien avec les besoins du monde. Et c'est vrai qu'en croisant ces 4 sphères, on réussit à trouver un espace d'équilibre qui va vous renseigner sur votre raison d'être.  

  
  

Jean Philippe Courtois : C'est formidable et en plus il se trouve que j'ai enregistré très récemment encore des entrepreneurs sociaux qui sont aussi des change makers comme je les appelle, qui sont assez extraordinaires et j'allais dire qu'ils ont ça en eux assez naturellement, cette connexion avec les besoins du monde, ils n'attendent pas d'être à la retraite… à 18/19 ans ou même avant ils sont déjà en pleine ascension pour aller escalader leur premier mont Everest avant de faire le deuxième, le troisième, etc. Ça, ça donne beaucoup d’énergie. Alors, on va en arriver malheureusement à la dernière question, Guila… Le temps passe très très vite… Quelle est finalement, c'est une grande question, votre définition d'un leader positif et quelles sont les aptitudes que vous mettriez en avant ou à développer pour chacun ? Parce que pour moi un leader positif, je ne vais pas m'avancer trop dans la définition, mais en tout cas, un leader, c'est à tout niveau, ce n’est pas une question d'être le boss, ça peut être dans une famille, ça peut être une communauté, une association, ça peut être une soignante… C'est quoi être un leader positif ?  

  

Guila Clara Kessous : Alors, déjà être un leader, ça suppose, contrairement à un manager d'accepter d'être vu et ça c'est quelque chose… On revient au théâtre… C'est quelque chose qui est une mise en risque, parce qu’accepter d'être vu, c'est-à-dire accepter d'être moqué, d'être ridiculisé, d'être décrié…  

  
  

Jean Philippe Courtois : S'exposer…  

  
  

Guila Clara Kessous :… d'être jalousé… Donc, l'exposition qui suppose aussi… Un Martin Luther King, c'est-à-dire une exposition importante, je dirais…  

  
  

Jean Philippe Courtois : Extrême…  

  
  

Guila Clara Kessous :… Ça doit être le propre d'un leader. Un leader comparé à un manager qui lui est un homme de l'ombre, qui est un homme du collectif, un leader doit être capable de se dresser seul. Pourquoi ? Parce qu'un leader ce n'est que quelqu'un qui crée du followership. On oublie toujours que les leaders ne sont que grâce à des followers. Donc, un leader positif, c'est quelqu'un qui va créer du followership positif, ça veut dire qu'en fait, dans sa façon de pouvoir s'ériger, dans son courage et dans sa capacité à porter le collectif, il va réussir à créer cet élan vers, et on retrouve cette idée de l'espoir, cet élan vers quelque chose qui va porter les gens vers quelque chose qui est de l'ordre d'un collectif meilleur. Donc pour moi le leadership positif, il a le courage de se montrer et il a la capacité aussi de communication pour pouvoir embarquer et pour pouvoir dépasser ses propres craintes, parce qu'il sait que lorsqu'il parle, il ne parle pas pour lui, ça n'est pas un acte d'égocentrisme, au contraire, il parle au nom des autres, pour les autres.  

  
  

Jean Philippe Courtois :  Quelle belle manière de conclure Docteur, Guila Clara Kessous. C'était vraiment un entretien extraordinaire pour moi… Donc, un immense merci, Guila pour cette discussion entre nous, c'était formidable et surtout pour des conseils très concrets aussi qui montrent que c'est à la portée de chacune, chacun d'entre nous de s'ériger, de se donner le droit de devenir un leader positif.   

  
  

Guila Clara Kessous : Tout à fait.  

  
  

Jean Philippe Courtois : Faisons-le !  

  
  

Guila Clara Kessous : Faisons-le ! Merci de m'avoir invitée, Jean-Philippe, c'était un plaisir.  

  
  

Jean Philippe Courtois : Merci beaucoup.