Positive Leadership

[FR] Construire une entreprise pour un monde Meilleur (avec Lucie Basch)

Jean-Philippe Courtois Season 6 Episode 4

Chaque année, 40 % des aliments cultivés dans le monde ne sont pas consommés.

Avec son application Too Good to Go, Lucie Basch est une entrepreneuse à l'impact positif qui a décidé d’agir pour changer les choses. Mais le démarrage de l'entreprise n'a pas été facile, et cela lui a permis d'apprendre beaucoup de choses sur elle-même.

J'ai été stupéfait par la volonté et le succès de ma dernière invitée dans le podcast #PositiveLeadership. Ensemble, nous avons parlé de la mobilisation de l'énergie positive pour développer une entreprise sociale rentable. 

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JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Bonjour, c'est Jean-Philippe Courtois et mon podcast Positive Leadership, le podcast qui vous aide à progresser en tant que personne, en tant que leader et enfin en tant que citoyen au sens le plus large.

 

LUCIE BASCH: Bah l'histoire que j'ai envie de raconter, c'est une histoire positive, une histoire d'espoir. Je pense que le système capitaliste nous a emmenés dans une direction que l'on peut utiliser pour créer une société où il fait bon vivre, une société dont on est fier, qui est plus centrée sur l'humain et sur notre rapport à la nature et au vivant de manière générale. Une histoire où on construit des véhicules à impact qui se reposent sur des modèles économiques efficients, qui nous permettent de changer les choses pour le meilleur, le plus vite possible.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Dans ce podcast, je rencontre un grand nombre d'entrepreneurs, de CEO, de Change Makers qui ont décidé de placer l'impact au cœur de la mission de leur entreprise, de leur stratégie et bien sûr de leurs produits. Dans ma recherche, j'ai évidemment pensé à mon invité d'aujourd'hui, Lucie Basch, qui m'a vraiment impressionné par sa détermination et son parcours. Après des études d'ingénieur à l'École centrale et de logistique à l'Université de Crown Field au Royaume-Uni, Lucie a cofondé Too Good To Go. Trop bon pour être jetée en français. Une application que beaucoup d'entre vous connaissent, révolutionnaire qui a évité de gaspiller l'équivalent de 300 millions de repas et qui compte plus de 75 millions d'abonnés dans 17 pays, dont 15 millions en France. Des chiffres incroyables qui en font la startup spécialisée dans la récupération alimentaire, affichant la plus forte croissance en nombre d'usages et de téléchargements. Lucie, je suis très heureux de t'accueillir dans ce podcast. Tu vas nous parler de la création d'une entreprise qui est presque devenue un mouvement, j'allais dire, et qui réalise un équilibre à la fois économique, financier et d'impact. Donc une très chaleureuse bienvenue à toi, Lucie.

 

LUCIE BASCH: Merci. Ravi d'être là.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Alors j'aimerais qu'on commence aussi par le commencement. Tu as grandi à Paris et déjà au tout début, tu as fait preuve d'une grande détermination et tu recherchais des choses qui avaient un sens. Alors, parle-nous un petit peu, peut-être de ton enfance et de comment cette enfance t'a préparé ou pas d'ailleurs, à devenir une entrepreneur à impact.

 

LUCIE BASCH: Effectivement j'ai grandi à Paris avec des parents qui faisaient des professions libérales, avec un grand frère et une petite sœur totalement différents de moi et ils sont tous les deux dans le cinéma aujourd'hui et ils ont un côté beaucoup plus artistique et créatif que moi qui suis un peu la matheuse et ingénieur de la famille. Et je pense que mes parents ont été très intelligents dans la façon dont ils nous ont élevés. C'est-à-dire que mon frère était plutôt dernier de la classe, moi j'étais plutôt première de la classe et pourtant je n'ai jamais grandi en me disant je suis plus intelligente que lui ou je suis meilleur que lui. Ils ont été très bons à nous expliquer qu'en fait chacun était différent et que l'éducation reconnaissait un type d'intelligence, mais que finalement il en avait plein d'autres et ça faits que...

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Plein de modèles, bien sûr.

 

LUCIE BASCH: Moi, quand je regarde leurs films, parfois je ne comprends rien et je me sens totalement bête là dessus. Et eux, inversement, quand ils voient mon métier aujourd'hui, ils disent, mais qu'est-ce qu'elle fait, elle est complètement folle. Donc ça, j'ai vraiment grandi avec cette idée qu'il n'y a pas une seule façon d'être bien, de réussir ou d'être intelligent. Et je pense que ça m'a donné beaucoup de liberté d'esprit et de confiance en moi aussi sur l'idée que quand on veut on peut, et qu'on peut tourner énormément de problèmes en solutions. Et donc c'est vrai que j'ai une personnalité qui voit assez systématiquement le verre à moitié plein et...

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: C'est partagé, je le vois aussi.

 

LUCIE BASCH: Ça m'aide pas mal.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Et est-ce que du côté de tes parents aussi, ton papa, ta maman peut être, il y a eu aussi soit une forme de modèle ou une forme, au contraire de...

 

LUCIE BASCH: Bah en fait j'ai réalisé ça assez récemment, mais effectivement des deux côtés, il y a beaucoup d'entrepreneurs dans ma famille. Mais en fait on ne me les a jamais vraiment présentés comme des entrepreneurs parce qu'il n'y avait pas le côté startuper ou, mais plus en fait, mes grands-parents paternels sont arrivés de Roumanie et de Pologne après la guerre, juifs tous les deux. Donc assez traumatisés aussi de leur aventure de vie. Et ils ont créé leur usine de tricots dont les ateliers étaient à Belleville et ils avaient une quinzaine de salariés.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: De vrais entrepreneurs.

 

LUCIE BASCH: Exactement. Mais en fait, on ne me les a jamais présentés comme des entrepreneurs. De la même manière, mon père était radiologue, donc il avait son cabinet de radiologie et donc de la même manière, il avait son entreprise et ses salariés.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Bien sûr.

 

LUCIE BASCH: Et du côté de ma mère, mon grand-père était bûcheron à son compte, puis promoteur assureur. Et donc il a monté son entreprise aussi avec ma grand-mère qui l'a aidé toute sa vie en plus d'élever cinq enfants. Et donc finalement, et ma mère est avocate profession libérale et donc elle a toujours exercé à son compte. Et donc finalement, sans m'en rendre compte, je n'ai personne de ma famille très proche qui est en CDI dans une entreprise finalement. Et donc peut-être que ça m'a donné en tout cas une liberté de l'envie d'entreprendre.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: En tout cas plein de rôles, plein d'industries ou de métiers très différents aussi visiblement qui ont pu t'inspirer. Alors un peu plus tard dans ton parcours, je crois que tu as été témoin aussi à un moment donné, à l'université d'un gaspillage alimentaire qui malheureusement se passait ou se passe encore d'ailleurs dans trop d'endroits. Et tu as commencé à faire quelque chose pour que ça change. C'était quoi ? Ça s'est passé comment ? Et qu'est-ce que tu as fait ?

 

LUCIE BASCH: En fait, c'est vrai que j'ai toujours été personnellement très sensible au gaspillage alimentaire, mais plus tôt parce que j'ai un esprit très rationnel. Il y a de la nourriture, c'est bon et il y a plein de gens qui ont besoin de se nourrir, donc pourquoi la jeter alors qu'elle est encore bonne à être mangée justement. Et donc c'était un peu le gag avec mes amis, même petite, qui me ramenait leur yaourt périmé,  leur banane où il y avait trop de noir sur la peau, alors qu'en plus à chaque fois que tu l'ouvres elle est parfaite à l'intérieur. Et même si elle est un peu noire, c'est juste plus sucré et c'est tout aussi bon avoir meilleur. Donc j'étais un peu connu comme ça. Et c'est vrai qu'à l'université, quand je me suis rendu compte qu'il y avait pas mal de conférences organisées au sein de l'université et que je voyais que tous les buffets à la fin de la conférence partaient à la poubelle alors que nous on était tous étudiants, qu'on avait des tout petits budgets pour manger et qu'on était ravi d'avoir la nourriture de conférence qui est plutôt de bonne qualité en général, je m'étais battu pour qu'effectivement, à la fin de la conférence, on mette tout simplement un petit panneau sur le buffet en disant : ce buffet sera débarrassé dans dix minutes.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Servez-vous !

 

LUCIE BASCH: D'ici là, servez-vous.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Allez-y.

 

LUCIE BASCH: Et donc finalement, c'était peut-être les prémices de Too Good To Go quelques années plus tard. Mais c'est vrai que, en fait, je l'ai vraiment fait plutôt par cohérence et envie de faire sens, plutôt que même par conscience écologique. Je ne vais pas être du tout pris conscience de l'ampleur de l'impact du gaspillage alimentaire sur la planète.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: C'était du bon sens pour toi, tout simplement de ne pas gâcher.

 

LUCIE BASCH: Exactement, du bon sens.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Alors ensuite, tu es parti au Royaume-Uni, tu as terminé ton master et puis tu es rentré dans une grande maison de l'alimentaire Nestlé.

 

LUCIE BASCH: Tout à fait.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Et je crois que tu n'y es pas resté très longtemps, 18 mois, même si tu vas nous en parler. C'était un très bon passage et une très bonne formation, j'imagine.

 

LUCIE BASCH: Tout à fait.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Et en fait, tu as démarré peu de temps après ça ton projet entrepreneurial. Alors, explique-nous un petit peu ces 18 mois. Peut être la prise conscience que tu as eue en te disant que tu es dans une voie royale, peut être chez Nestlé pour faire une superbe carrière, mais non. Je m'en vais.

 

LUCIE BASCH: C'est vrai que moi, l'alimentation c'est toujours mon sujet. Je trouve que c'est un sujet passionnant et qui rallie tout le monde. Et c'est vrai que du coup, rentrer chez Nestlé en plus en Graduate Program qui est un programme où on fait un tour d'entreprises qui forment les futurs leaders de l'entreprise, j'ai trouvé que c'était une opportunité incroyable, notamment en me disant si j'arrive à faire évoluer un groupe comme Nestlé ne serait ce que d'un pour 100 plus impactant, plus positif sociétalement, l'impact est absolument énorme. Donc j'étais pleine de courage et d'espoir en intégrant le groupe au Royaume-Uni. Et donc j'ai eu un tour d'entreprise effectivement totalement passionnant où je suis passé d'usines de bouteilles d'eau en plastique à des usines de café, à des industries du petfood, de la confiserie. Donc c'était vraiment... J'ai appris énormément de choses et j'étais tous les jours sur la chaîne de production. Donc pour moi qui avait grandi à Paris d'une maman avocate et d'un papa médecin, je bossais avec des ouvriers d'usine dans des bleds de 1000 habitants sur la chaîne de production, c'était vraiment ce dont j'avais besoin pour me ramener au monde réel, un peu et me et me sortir de mon de mon entre soi parisien peut être. Et donc ça a été absolument passionnant. Par contre, très rapidement, je me suis rendu compte que la façon dont on produisait de l'alimentation aujourd'hui me semblait assez décorrélée des réflexions écologiques, des réflexions de santé quand même. Ce qu'on met dans notre corps au quotidien, bien évidemment, ça a un impact sur notre santé et notre bien-être. Et c'est vrai qu'à l'époque, sur les chaînes de production, ce n'était même pas une considération en fait. Et donc, je me suis rendu compte que mon boulot, c'était l'amélioration continue en plus...

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Des process tout simplement.

 

LUCIE BASCH: C'était comment est ce qu'on produit le plus vite possible, le moins cher possible, quitte parfois à avoir plus de défauts sur la chaîne et donc plus de gaspillage. Mais en fait, l'important, c'était le coût marginal de chaque produit. Et en fait, je me suis retrouvé à faire des projets qui étaient célébrés comme un vrai succès de l'entreprise alors que finalement ils produisaient plus de déchets.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Plus de déchets.

 

LUCIE BASCH: Et c'est là que ça a commencé un peu à me titiller en me disant, en plus, moi quand je fais les choses, je les fais à 200 % et donc je me levais à 5 h du matin, je bossais sur les shifts, je finissais à 20 h, j'habitais sur le parking de mon usine. Donc j'étais vraiment à fond et c'était tout aussi passionnant et enrichissant qu'un peu décorrélé de plus en plus de mes valeurs personnelles et de la vision que j'avais aussi pour le monde de l'alimentaire de demain.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: L'entrepreneuriat social consiste à développer de nouvelles organisations innovantes dans le but de résoudre des problèmes sociaux et environnementaux. Et Lucie possède en abondance, évidemment, toutes les caractéristiques classiques d'une entrepreneure sociale. Elle est naturellement curieuse des gens et des problèmes qu'ils rencontrent, ce qui est fondamental. Elle est aussi pragmatique, mais elle est très déterminée et il est vite apparu qu'avec son énergie phénoménale et son profond désir de changement, le travail dans une entreprise n'était sans doute pas fait pour elle. Elle a commencé à se demander comment coder une application qui permettrait à tout le monde de faire un geste concret pour réduire le gaspillage alimentaire. Alors qu'elle travaillait encore chez Nestlé.

 

LUCIE BASCH: En fait, j'étais rentrée chez moi à Noël, je crois. J'étais passé devant une boulangerie qui était en train de jeter plein de produits et j'avais proposé de les récupérer et on m'avait dit non, je n'ai pas le droit de vous les donner. Et du coup, j'avais dit tant pis, je vous les achète, même si c'est déjà la fermeture. Et elle m'avait finalement donné beaucoup plus de produits. Et je me rappelle, j'étais rentrée chez moi hyper contente. J'en avais parlé à tout le monde en disant, en regarde tout ce que j'ai récupéré, etc. Et c'est là que ça avait un peu fait tilt en me disant si cette petite expérience qui vient de se passer et qui m'a réjoui, qui a réjoui la personne qui me les a données et qui a réduit le gaspillage, pouvait se reproduire à large échelle, ce serait absolument incroyable. Et donc du coup, j'étais allée sur le site du Zero, de retour sur le parking de mon usine en Angleterre et j'avais commencé à coder un peu l'appli.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: D'accord.

 

LUCIE BASCH: Je me suis rendu compte que je n'irais pas très loin avec mes talents de fausse développeuse et que donc c'était peut être l'occasion d'aller chercher des gens qui pourraient m'aider à coder l'application. Et après quelques mois plus tard, j'ai entendu le discours de Steve Jobs justement, qui parlait aux étudiants de Stanford en leur disant : soyez sûr de toujours suivre votre passion dans la vie et une fois que vous l'avez trouvée, mettez tous vos efforts et vos énergies à vous y atteler. Et donc, c'est à ce moment-là que je me suis dit, allez, quand faut y aller, il faut y aller. Et si moi, du haut de mes 22 ans, sans crédits, sans enfants à charge, je n'arrive pas à faire le saut vers, allez, je tente, qui va le faire finalement ? Et quand est-ce que je le ferais ? Et donc j'ai pris le pari.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Donc tu as pris le pari. Je me rappelle d'ailleurs pour tous nos auditeurs, c'est un super discours qu'on retrouve toujours sur YouTube, de célébration, d'université, de graduation, de Stanford. Voilà, des étudiants, donc ils donnaient vraiment l'étoile du nord pour chacun des étudiants de Stanford à l'époque. Alors, je crois, qui est parti en Scandinavie, ensuite Lucy. Et c'est là où tu as rencontré, je ne sais pas si c'est par accident, mais tu allais à une conférence, je crois, tes futurs associés et qui était pas mal dans les pays nordiques notamment. Ça s'est passé beaucoup dans les Nordiques, entre Danemark, Norvège, etc. Parle-nous un petit peu de cette période là, comment ça s'est fait ?

 

LUCIE BASCH: Donc en fait, je quitte Nestlé avec l'envie de lancer mon projet. Je pars m'installer en Scandinavie avec aussi l'envie de rencontrer tout un tas de personnes. Je m'intéresse pas mal à l'économie collaborative, à l'économie circulaire et je rencontre énormément de gens. Et à chaque fois, quand on rencontre des gens, ils nous disent : toi, tu fais quoi dans la vie ? Donc forcément, il faut une réponse, c'est la pression sociétale. Et donc je dis, je lance mon appli sur le gaspillage alimentaire. Et donc finalement, en parlant du projet, il se concrétise de plus en plus dans ma tête où on me pose des questions. Du coup, il faut trouver les réponses. Et donc finalement, et moi j'encourage toujours à partager ces idées quand on en a. Parce que moi c'est vraiment en partageant l'idée de plus en plus que j'ai commencé à la concrétiser encore davantage dans ma tête.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Parce que tu prends de l'input et tu prends d'autres perspectives, d'autres questions auxquelles il faut réfléchir beaucoup plus en en profondeur.

 

LUCIE BASCH: Exactement, je vois ce qui plaît beaucoup aux gens, ce qui fait tilt, ce qui ne fait pas tilt, ce qui est clair, ce qui ne l'est pas. Donc assez intéressant. Et en fait, au fur et à mesure que je parle du projet, j'entends un jour parler de gens qui sont en train de faire exactement la même chose que moi.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Oui.

 

LUCIE BASCH: Donc c'est quelqu'un à qui je raconte le projet. Il fait : mais ça existe déjà. Moi je connais quatre garçons au Danemark qui sont en train de faire la même chose, et cetera. Donc là je me dis, non.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Trop tard.

 

LUCIE BASCH: Je n'ai même pas encore commencé. Il y a déjà des concurrents, et cetera, non. Et en fait, il se trouve que la conférence à laquelle j'étais s'appelait Collaboration is the New Competition. La collaboration, finalement, c'est la nouvelle façon...

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Open Collaboration.

 

LUCIE BASCH: Exactement. Et donc je me dis : en fait non, c'est peut être super. Je cherche des associés, ils sont en train de faire la même chose, donc je les appelle. Et effectivement eux très vite me disent ah ben c'est top, nous on est au Danemark. En plus, effectivement, il y a de plus en plus, on sent qu’en Norvège on pourrait faire plein de choses. Donc si toi t'es là bas, ben vas-y, démarre.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Démarre en Norvège.

 

LUCIE BASCH: Démarre en Norvège. Et donc si tu veux je fais mes flyers ni un ni deux et je pars. À l'époque ils n'ont qu'un site Wordpress qu'ils ont, mais par contre ils ont l'un d'entre eux qui est développeur et qui est en train de coder une application, et cetera.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Une application, d'accord.

 

LUCIE BASCH: Eux, à la base, ils n'ont pensé le concept que pour les buffets à volonté qui existent beaucoup au Danemark, mais qui n'existent pas du tout en Norvège. Et donc moi, en tant que Française, je leur dis, mais non c'est sur la boulangerie que je vais le faire. Et donc finalement, au fil des discussions, on part sur aller contacter tous les commerçants alimentaires, eux à Copenhague, moi à Oslo avec une Norvégienne. Et lancer le concept de Too Good To Go finalement.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Et comment fonctionne le modèle économique alors ?

 

LUCIE BASCH: Alors le modèle économique, il est gagnant gagnant gagnant. Donc le consommateur vous payer un tiers du prix. Le commerçant, vous allez récupérer une somme sur des produits que vous alliez jeter à la poubelle et payer des traitements de déchets par ailleurs. Et donc, en fait, sur les 4 €, Too Good To Go prend une commission d'environ 1 €. Ça dépend des pays. Et donc sur les 4 € payés sur l'application, nous, en fin de période, on va renvoyer 3 € au commerçant. Et donc encore une fois, c'est cette idée de avec quelque chose qui partait à la poubelle, on crée de la valeur économique et donc on la répartit entre les différentes parties que sont le consommateur, le commerçant et l'application.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: J'adore cet équilibre un petit peu, cette balance économique entre les entre les trois grands protagonistes finalement. Au niveau d'ailleurs de tous ces acteurs partenaires que vous avez, points de vente, commerçants, et cetera, qu'est ce que ça représente à peu près en termes de marge supplémentaire, peut-être dans leur activité ? Parce que c'est important aussi.

 

LUCIE BASCH: Complètement. C'est vraiment de la marge nette supplémentaire, puisque c'est des produits qu'ils auraient jetés. Et ça, en fait, nous, on leur fait un virement tous les mois ou tous les trimestres en fonction de l'argent supplémentaire qu'ils ont généré. Et donc au début on leur disait de le rajouter en chiffre d'affaires exceptionnel. Et alors, après ça dépend vraiment comme on a tout type d'industrie entre les supermarchés, les boulangeries, c'est vraiment différent pour chaque business.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Chaque modèle.

 

LUCIE BASCH: Et l'idée, c'est que ce soit une petite partie parce qu'on leur dit toujours : si votre modèle économique repose sur Too Good To Go, vous êtes mal barrés. Donc ce n'est pas l'idée. Et nous, d'ailleurs, ce qu'on leur met en avant, c'est que numéro un, ça leur permet de ne plus jeter. Numéro deux, ça leur génère un nouveau flux de clients qui vont les découvrir via l'application et goûter leurs produits et revenir potentiellement entre 12 h et deux à des heures plus classiques, choisir les produits qu'ils souhaitent avoir. Et numéro trois, c'est une vraie image de marque engagée dans la réduction du gaspillage alimentaire qu'ils peuvent mettre en avant. Et moi je dis toujours aux commerciaux de Too Good To Go, c'est sur ces trois arguments que vous devez convaincre. Et pour qu'on arrive à la question, OK, ça a l'air top votre truc, mais ça va me coûter combien ? Non, ça ne va rien vous coûter, ça va vous rapporter de l'argent. Et là, c'est bon, on commence tout de suite et c'est la magie.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Si le gaspillage alimentaire était un pays, ce serait le troisième émetteur de gaz à effet de serre, derrière les États-Unis et la Chine. Oui. Et bien tout ça parce que 40 % de la totalité des aliments produits dans le monde finissent non consommés chaque année. Et quand la nourriture se retrouve dans une décharge, elle produit d'énormes quantités de gaz à effet de serre. Le gaspillage alimentaire survient à de nombreuses étapes de la chaîne d'approvisionnement, depuis les produits qui se gâtent dans les semi-remorques jusqu'à la surproduction dans les exploitations agricoles. Mais plus de la moitié de ce gaspillage a lieu chez les consommateurs. D'où le gros intérêt, bien sûr, de l'application Too Good To Go de Lucie qui permet à chacun d'entre nous d'agir. Les utilisateurs de l'application peuvent chercher des restaurants, des boulangeries, des épiceries près de chez eux et acheter des paniers surprises remplis de produits non vendus, que ce soit des bagels, des nouilles chinoises, des fruits et légumes invendus à la fin de la journée. Ces paniers sont vendus entre trois à 5 €, mais ils contiennent les nourritures pour environ trois fois ce prix. Si bien que, évidemment, les clients bénéficient d'une super remise. L'application a d'abord été lancée en Europe en 2015, puis aux États-Unis en octobre 2020 et est aujourd'hui disponible dans 17 pays. Plus de 200 000 entreprises sont inscrites sur la plate forme et Lucie dit que l'application évite ainsi de jeter 300 000 repas à la décharge chaque jour dans le monde entier. Alors justement, j'aimerais qu'on parle de ces phases assez phénoménales, que Too Good To Go a connues, que tu as connues et que tu as réussi à développer, d'accélération d'hyper croissance. Et il y a un livre que j'ai bien aimé parce que c'est quelqu'un que j'aime bien Reid Hoffman, le livre Blitz Scaling. C'est un livre qui parle finalement du succès des entreprises en hyper croissance. Il met en avant trois modèles de blitz Scaling dans son analyse. Il dit soit c'est une innovation stratégique, soit c'est l'innovation de business model ou soit c'est une innovation managériale aussi, ce qui peut arriver.

 

LUCIE BASCH: Intéressant.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Voilà. Alors selon toi, quelle est la recette magique de leurs succès ? Parce que vous avez créé évidemment ce que j'appellerais un social business model très innovant. Et donc, est-ce que c'est une stratégie d'innovation technologique avec l'App ou bien pourquoi pas un nouveau modèle quelque part de management des parties prenantes, comme on dit aussi que vous avez ? En considérant les intérêts, comme tu l'expliquais très bien, de toutes les parties prenantes, c'est quoi ?

 

LUCIE BASCH: Je pense que c'est toujours un peu un mix. Il n'y a pas de recette magique, je dirais. Mais déjà pour moi, ce qui était très important, c'était un produit super simple. C'est-à-dire que l'appli tu la pitches en deux minutes. C'est très simple. Le bouche-à-oreille a fait énormément parce qu'en fait tout le monde le comprend. Et du petit enfant à la grand-mère en passant par la famille, les business, les gens actifs, et cetera, tout le monde le comprend.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Tout le monde peut l'utiliser.

 

LUCIE BASCH: Donc je pense que s'accrocher à un produit super simple, c'est assez la clé de l'hyper croissance. Deuxième sujet, s'attacher dur comme fer à ses valeurs, à sa vision, à sa mission. Pourquoi ? En fait, on dit tout le temps c'est quoi le why ? Et pour moi, à chaque étape de Too Good To Go, il a fallu être sûr qu'on ne perde pas nos valeurs et que la façon dont on faisait les choses soit vraiment alignée avec la raison pour laquelle on avait voulu le faire. Et puis je dirais que le troisième, c'est bien évidemment, et je sais qu'on se rejoint là dessus, on ne fait rien sans les humains derrière. Et donc, être en permanence dans la recherche d'équipe qui fonctionne bien ensemble, de gens qui sont motivés par le projet, scindés autour de valeurs communes et acquis et qui ont une vraie expertise et à qui on laisse la possibilité d'utiliser cette expertise...

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Une marge de manœuvre, aussi.

 

LUCIE BASCH: Complètement. Et en fait, je pense que le travail d'un entrepreneur dans une entreprise en hyper croissance, c'est en permanence se retirer des sujets, se retirer des sujets, se retirer des sujets, déléguer au maximum et accepter. Connaître ses limites à soi pour laisser rentrer d'autres gens qui savent mieux faire que nous et les laisser faire leur boulot en fait.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Je pense que c'est un très beau résumé et j'aime beaucoup ton triptyque de simplicité et notamment du produit. Parce que l'expérience produite est quand même critique, tout simplement, essentielle. Les valeurs, le pourquoi on est là, et puis les femmes, les hommes qui permettent tous les jours d'être aligné avec la mission de l'entreprise et de la véhiculer dans leur quotidien, c'est tellement essentiel. Alors on parlait tout à l'heure un petit peu ensemble de tes associés et je sais qu'à un moment donné, effectivement, je crois que c'était en 2017 avec huit associés, c'est ça en tout ? Il y avait les structures To Good To Go en Norvège, au Danemark, en France, au Royaume-Uni. Et là vous avez fait preuve, moi, ce que je trouve un pragmatisme assez incroyable en mettant d'accord tous pour favoriser la création d'un groupe Too Good To Go unique. Parce qu'au départ il y avait vraiment des filiales différentes.

 

LUCIE BASCH: Ouais, complètement.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Et du coup, en partie en renonçant aussi à une part plus élevée du capital pour toi.

 

LUCIE BASCH: Complètement.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Alors, comment tu aborder cette décision ? Et est-ce que tu la regrettes aujourd'hui finalement ou pas ?

 

LUCIE BASCH: Non, bien sûr. De toute façon, je ne regrette rien.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: C'est bien.

 

LUCIE BASCH: Non, mais effectivement, en fait, on était tellement peu sûr, moi je n'imaginais même même pas pouvoir me rémunérer un jour avec l'aventure Too Good To Go. Donc de là à créer un CDI, puis 1200, ça me paraissait totalement inconcevable à l'époque. Et donc en fait, quand on a lancé Too Good To Go, comme on était tous de nationalités différentes, on s'est dit : chacun crée sa boîte et puis on verra plus tard. Et donc moi, effectivement, je n'ai même pas eu de part dans l'aventure norvégienne. J'ai créé Too Good To Go France dont j'étais l'associé unique. Ma collègue, ma future associée norvégienne, a créé Too Good To Go Norvège, dont elle était 100 %. Et puis les quatre Danois ont créé leur structure danoise aussi. Et pareil en Angleterre. Et donc finalement ne s'est posé la question d'association et de capital, que quand on a vu que ça commençait à vraiment marcher, qu'on a eu des investisseurs qui ont été intéressés aussi de rentrer dans une structure, mais qui ne se voulaient pas que national, mais vraiment international. Et donc effectivement, c'est un an plus tard qu'on a conçu Too Good To Go dans laquelle on a apporté toute l'intégralité de nos entreprises. Et donc on est passé d'associé unique d'une entreprise où on possédait 100 % de la boîte à finalement se partager un plus gros gâteau, certes, mais, un gâteau. Et donc la question c'est bien sûr comment est-ce qu'on se le partage ? Et donc forcément, là, il y a un moment en fait où tu... Ça revient à ce que je disais tout à l'heure, c'est pourquoi est-ce que tu veux faire ce que tu es en train de faire et qu'est-ce qui t'importe ? Et finalement, moi, la question de m'enrichir avec cette aventure, elle, c'était vraiment... Je n'avais jamais eu cette motivation en fait, quelque part. Et puis en plus, à l'époque, on n'y croyait pas forcément complètement dans cette idée que si ça se trouve, un an plus tard, on n'existait plus. Comme on savait qu'à peu près neuf startups sur dix s'arrêtent, dans la première année, on n'était pas très préoccupés par le long terme. Et donc finalement, il a fallu s'entendre. Il y en avait pour qui l'aspect capitalistique était plus important que d'autres. Moi, j'ai aussi fait partie de celles qui ont un peu lâché du lest. Mais c'est vrai que pendant cette période de réflexion, c'est une période où c'est très compliqué parce que de toute façon, c'est, soit on se tape dans la main, soit on part chacun de notre côté. Et donc finalement, chaque jour, pendant toute cette période, chaque jour, tu te réveilles en te disant est-ce que je suis en train d'aider mon futur concurrent ou est-ce que je suis en train de maximiser ma boite, et cetera ? Et donc moi, j'ai quand même tenu à ce que cette période avance vite. Et donc c'est là où en fait tu te poses les bonnes questions et tu lâches assez facilement, en fait. À partir du moment où moi mon intérêt c'était de faire que Too Good To Go grandisse le plus vite possible et de vivre pleinement mon aventure entrepreneuriale, finalement, le capital, c'était secondaire et voilà. Et c'était bien évidemment, je pense, un très bon choix, parce qu'aujourd'hui, vaut mieux avoir une toute petite part d'un très gros gâteau qu'une grosse part d'un petit gâteau. Et donc, c'est ce qui s'est passé. Et je pense qu'aujourd'hui on est tous ravis et même en termes financiers, on sortira de cette aventure beaucoup plus qu'on ne l'aurait imaginé.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Et moi je dis chapeau, parce que connaissant pas mal de startuppers ou entrepreneurs qui ont été confrontés à des choix un petit peu avec des associés critiques, eh bien je pense que tu as fait, vous avez fait le bon choix.

 

LUCIE BASCH: Et c'est marrant parce que tous les gens à qui j'ai demandé conseil à cette époque-là, tout le monde m'a dit : ne signe pas ça. Tu te fais avoir, en fait. Et j'ai dit OK, mais j'y vais quand même. Et en fait, je suis plutôt contente.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Bravo d'avoir suivi ton intuition ici. Alors en revenant un petit peu sur le modèle de Reid Hoffman, dans son bouquin, il parle de l'évolution d'une organisation en disant, au départ c'est une famille, c'est moins de dix personnes. Après, on passe à une tribu, c'est quelques dizaines d'employés. Après on passe un village, c'est quelques centaines, après c'est une ville, plusieurs milliers. Vous vous trouvez maintenant vraiment au moment d'être une ville et peut-être même à un moment donné à celle d'une nation. Il y a des dizaines de milliers d'employés, voire des centaines de milliers, et cetera. Alors, moi, j'aimerais que tu nous racontes un petit peu les, pas chacune de ces étapes, mais les premiers jours de cette famille, et quelque part, peut être une ou deux anecdotes après, quand c'est devenu une tribu ou un village. Et en quoi ça t'a marqué ou aidé à grandir en tant que leader aussi ? Parce que ce n'est pas simple d'être au milieu d'une famille. Et puis après la famille, ce n'est plus la même chose.

 

LUCIE BASCH: C'est ça. Et puis en fait, au début tu commences... Moi je n'ai commencé qu'avec des bénévoles autour de moi. Donc, j'étais plus redevable d'eux.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Oui.

 

LUCIE BASCH: Que eux, de devoir me rendre des comptes en fait.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Ce n'est pas des salariés en fait au début.

 

LUCIE BASCH: Non parce que j'avais zéro au fond en fait. Donc, les Flyers je les payais avec mon argent de poche et les cafés, on essayait de trouver les cafés où on pouvait rester le plus longtemps possible en consommant le moins de café possible. Enfin, on en était vraiment là. Et je suis retourné habiter chez mes parents et je me suis nourri en tout goût de tout au moins les deux premières années, quoi. Donc la première salariée qui m'a rejoint, je vous rappelle, on a fait un entretien et à la fin de l'entretien, j'ai dit écoute, c'est super, j'aimerais beaucoup travailler avec toi. Par contre, je ne peux pas te rémunérer pour le moment. Donc ce que je te propose, c'est que tu commences comme ça et si dans trois mois on y arrive bien, je pourrais commencer à te rémunérer en freelance. Là, son sourire s'est décomposé, elle a raccroché. Et puis elle m'a rappelé quelques jours plus tard en me disant OK, on y va. Trois mois plus tard, elle se rémunérait en freelance. Un an plus tard, ça devenait la première salariée en CDI. Et sept ans plus tard, elle y avait un poste de directrice d'une entreprise mondiale où elle a fait tous les échelons, et elle a eu un parcours absolument incroyable chez Too Good To Go. Donc, c'est Camille que je salue notamment et qui est... Voilà, elle a pris le pari avec moi et finalement c'était un bon pari aussi. Mais c'est vrai qu'au début on a une relation un peu bizarre. Et puis je suis assez d'accord, il y a ce stade de, dès qu'on passe la barre des dix, onze, on commence à être une vraie équipe. C'est-à-dire que quelque part, en tant que manager, on se retrouve un peu exclu.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Oui.

 

LUCIE BASCH: C'est-à-dire qu'on ne fait plus partie de l'équipe. On est celle où quand j'arrive dans la salle, on va arrêter de parler de la grosse teuf de ce week-end parce que... Mais pas par, et surtout qu'en plus moi je l'ai pris un peu comme une espèce de trahison au début de : hey, on est tous copains et en fait vous n'excluez de ça. Et en même temps on le comprend assez naturellement où forcément, même s'il n'y a pas de hiérarchie dans les rapports au quotidien, il y a une réflexion de qui décide du salaire, qui décide de, est-ce que je fais encore partie de l'aventure ou pas ? Et donc finalement... Mais on peut lutter contre autant qu'on veut. En fait, ça s'installe. Et moi, c'est vrai que j'en ai moins souffert à partir du moment où j'ai accepté et que je ne l'ai pas pris personnellement, mais que je me suis dit c'est ça aussi en fait monter une entreprise. Donc ça, ça a été une première réalisation quand même, la fois où ils ont changé de sujet quand je suis arrivé dans la salle, ça ne m'a pas fait plaisir. Et puis après voilà. Après on devient manager de manager et manager, de manager, de manager. Après, on se retrouve aussi notamment avec la presse. Et moi j'ai fait quand même pas mal de prises de parole publiques, où en fait, les gens qui arrivent dans l'entreprise ont déjà écouté tes podcasts, ils ont entendu tes interviews et du coup, quand ils arrivent, ils te regardent, il te mette déjà sur un piédestal qui ne l'est pas trop en fait.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Ils sont impressionnés. Oui bien sûr.

 

LUCIE BASCH: Et tu te retrouves à avoir des gens de ton âge ou plus vieux que toi, qui te vouvoient, qui ne sont pas du tout à l'aise quand ils te parlent. Et ça, c'est pareil. C'est difficile parce que ça change un peu les relations. En plus moi je suis très spontané et je veux surtout être resté hyper accessible. je pense que je le suis resté d'une manière ou d'une autre. Mais c'est vrai que malgré tout ça, malgré les efforts qu'on peut faire en tant que dirigeant, eh bien les relations sont beaucoup moins naturelles qu'au début.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Comme beaucoup de choses dans la vie, c'est sur le tas qu'on apprend à gérer une équipe. Lorsque Lucie a démarré Too Good To Go, elle avait à peine plus d'une vingtaine d'années. Et quand la société est entrée dans une phase d'hyper croissance, elle a dû embaucher un grand nombre de nouveaux responsables et Lucie a appris au fur et à mesure. Et bien sûr, comme chacun d'entre nous, elle a fait des erreurs aussi. Il y a quelques années, elle a subi de sévères critiques personnelles sur sa façon de diriger et je me suis demandé comment elle avait vécu ce moment très difficile aujourd'hui, rétrospectivement.

 

LUCIE BASCH: Donc, la première réaction c'est triste en fait. C'est dur de se faire critiquer quand on donne autant que ce qu'on peut dans une aventure. Et en même temps, voilà, moi j'ai toujours prôné le feedback et de se dire les choses et aussi reconnaître que je ne savais pas faire, que c'était la première fois que je montais une boite, que je manageais des équipes.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: On ne sait pas tout.

 

LUCIE BASCH: Et donc je n'ai jamais revendiqué le fait d'être parfaite ou de savoir exactement ce que je faisais.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: C'était quoi le problème, tu peux le dire.

 

LUCIE BASCH: Des petites histoires où on savait très bien où ça menait. Typiquement, un jour, moi j'arrivais tout le temps à 8 h du matin au bureau et je suis arrivée et il y avait plein de gros sacs Ikea d'affaires. Et donc j'ai dit en rigolant comme ça il y avait trois salariés dans le bureau : non, mais c'est quoi ce délire ? Il y a un SDF qui a emménagé au bureau ou quoi ? Et en fait c'était une de nos stagiaires qui venaient de se faire virer de chez ses parents et qui m'a dit non. Je me suis fait virer de chez mes parents, et cetera. À ce moment-là, mais immédiatement, j'ai tout de suite pris la mesure de la bêtise de ma réflexion. On est partie toutes les deux. J'ai fait : je suis vraiment désolée. Comment ça se passe ? Comment est-ce qu'on peut t'aider ? Derrière, elle a été suivie par les RH aussi, etc. Et donc on a vraiment, enfin je me suis excusée en disant je suis désolée, c'est vraiment une mauvaise réflexion. Je n'avais même pas pensé que ça a pu se passer. Et trois ans plus tard, c'est ressorti. Un jour, alors que je venais de faire virer, la fondatrice rentre dans le bureau. Et encore une fois, j'ai été totalement maladroite. C'est bête de dire ça.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Ça nous arrive à tous. Mais oui.

 

LUCIE BASCH: Exactement, mais l'erreur est humaine et je ne pense pas que ça vaille... Enfin, et derrière on me dépeint comme si les gens qui me connaissent pas en plus te disent : elle est hyper méprisante, et cetera. Alors que je pense que ceux qui me connaissent ne diraient pas ça. Et de la même manière, tu vois, quand je suis parti lancer les États-Unis, on était en plein Covid et donc la frontière était fermée entre Schengen et les États-Unis, donc il fallait sortir de l'espace Schengen. J'imagine que tu en as fait les frais aussi. Il fallait sortir de l'espace Schengen. Mais en tant que Français, il y avait peu de pays qui t'acceptaient aussi. Et donc la technique, c'était de passer par les DOM-TOM qui n'était pas Schengen, mais qui était la France, donc où j'avais le droit d'aller en tant que Française. Et donc on s'est retrouvé deux semaines de quatorzaine à Saint-Barthélemy, ce qui, je peux t'assurer je n'avais absolument pas envie d'être à Saint-Barthélemy quand la boîte en Europe s'écroulait et qu'on avait perdu 70 % de notre chiffre d'affaires en deux semaines et que j'étais à deux doigts de lancer les États-Unis avec des salariés qui étaient déjà recrutés et qui m'attendaient pour démarrer leur journée de travail. Donc c'était juste le pire endroit sur terre pour moi. Sauf que pour aller à Saint-Barthélemy, l'avion de ligne classique qu'il faut prendre, c'est sur la dernière heure de vol, on te fait prendre un petit coucou de douze places pour arriver sur l'île. Et donc un des commentaires sur Balance ta start up c'était : alors que nous étions tous confinés à Paris, la fondatrice est partie en jet privé à Saint-Barthélemy direct. C'est de l'indélicatesse quelque part. Et ça, encore une fois, on y revient. Moi, je suis très spontanée, je dis un peu tout ce qui me passe par la tête sans réfléchir à l'impact. Et effectivement, quand tu es à la tête d'une boîte de 1000 personnes, quand tu dis un mot, le mot compte et il faut bien le choisir. Donc c'est des apprentissages, bien évidemment.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: L'impact social, c'est vraiment au cœur même de ton entreprise et d'autres initiatives que tu as aussi, qui est devenue d'ailleurs... Too Good To Go est devenu une B Corp aussi. Alors est-ce que tu peux nous expliquer comment, voilà, malgré, j'allais dire avec au contraire le succès rencontré, toi et tes associés vous êtes restés finalement très centrés sur vos valeurs, j'ai l'impression depuis la création ? Et de me dire aussi manière candide si vous avez reçu néanmoins des pressions de la part de vos investisseurs. Parce qu'à un moment donné, ce n'est pas des bénévoles uniquement. Il y a des. Il y a des investissements capitalistiques chez Too Good To Go, donc assez significatif. Et pour arriver finalement à cet équilibre entre la rentabilité bien sûr et l'impact, c'est le fameux yin an yang dont on parle dans l'entreprise à impact.

 

LUCIE BASCH: Complètement. Notamment avec un contexte qui a quand même beaucoup évolué ces dernières années post-Covid avec la crise de la Tech, la rentabilité est devenue une question encore plus pressante qu'elle n'était avant. Et puis aussi, en construisant Too Good To Go, en ayant envie de construire une entreprise, il s'agissait vraiment aussi de montrer qu'on peut faire les deux en fait. Et ce n'était pas l'idée de dépenser des millions et des millions pour l'impact. C'était de se dire comment est-ce que c'est possible de créer une entreprise qui génère un bénéfice économique autant qu'elle génère un bénéfice sociétal, social et écologique ? Donc, je pense que très très tôt, on a posé sur le papier notre vision, notre mission et nos valeurs. Et ça, moi, je recommande à tout le monde de le faire.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Donc, cette clarté, face à des investisseurs.

 

LUCIE BASCH: En fait, ce n'est pas parce qu'elle est claire dans ta tête en tant qu'entrepreneur qu'elle est claire pour absolument tout le monde. Et d'ailleurs, quand on fait l'exercice de poser sa mission et sa vision, ce n'est pas si simple.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Non, très compliqué.

 

LUCIE BASCH: Et on dit, ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, donc autant faire l'exercice. Ça nous met face à nos questionnements aussi. Et parfois on pense qu'on est tous d'accord et finalement sur un mot on s'arrête et on n'est pas du tout d'accord. Et donc c'est un très bon exercice, je pense, de le faire et de le faire le plus tôt possible. Et puis les valeurs, elles peuvent évoluer ou s'exprimer différemment au fur et à mesure de la taille de l'entreprise. Et donc ça aussi, il ne faut pas hésiter à les revoir, les repenser. Mais, c'est important de les avoir écrites aussi et de recruter les salariés qui vont partager ces valeurs. Exactement.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Donc vous êtes restés fermes là dessus avec les investisseurs et vous avez réussi à établir une feuille de route sur laquelle vous êtes restés fidèles à ces principes.

 

LUCIE BASCH: Complètement. De la même manière qu'on recrute ses salariés, nous, on a eu la chance de pouvoir recruter nos investisseurs...

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Oui, c'est une chance aussi.

 

LUCIE BASCH: Et donc de prendre, oui, complètement, mais donc de prendre des investisseurs qui partageaient nos valeurs, qui avaient envie de nous pousser dans le respect de ces valeurs justement. Et qu'on soit tous gardes fous en fait. Et moi, ça, je l'ai toujours dit, en tant que dirigeant, tu n'es pas le seul responsable de la juste expression de ces valeurs. Tu as ta responsabilité comme chacun des salariés ont leur responsabilité aussi de porter ces valeurs au quotidien. Et de la même manière, dans un board, il y a aussi cette réflexion de nous confronter à est-ce que ça, ça va avec vos valeurs ? Et notamment quand on est sur des sujets d'hyper croissance avec nous, pendant longtemps, l'âge moyen de chez Too Good To Go, il était en dessous de 30 ans. Donc avec un manque d'expérience quand même assez important, en commençant par la mienne où on va faire des erreurs. Et donc l'idée c'est toujours que chacun puisse être garant de la juste expression de ces valeurs. Et je pense que c'est un combat de chaque jour qui n'est jamais terminé. Mais donc voilà, et non je dirais que les investisseurs c'est plus nous en fait, on essaie toujours de trouver le juste équilibre entre performances...

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: À vous challenger sur les deux facettes.

 

LUCIE BASCH: Voilà, c'est ça. On a aussi envie de... Voilà, quand on lance un pays et que, alors que la plupart sont rentables au bout de 18 à 24 mois, trois ans plus tard, on n’est toujours pas rentable, on se pose des questions, on se challenge et il faut trouver toujours le juste milieu entre impact et rentabilité économique.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Et c'est quelque chose que j'ai bien ressenti aussi en visitant tes locaux puisque gentiment, tu m'as accueilli là bas et je sais que tu ne contentes pas simplement de maximiser l'impact par le nombre de repas sauvé, mais tu recherches un changement plus systémique. Et je me souviens notamment, on s'était attardés auprès de matériaux éducatifs que tu as préparés avec tes équipes, auprès des écoles pour changer un petit peu la formation des enseignants, un petit peu le narratif autour de ça, auprès des enfants, qui est un gros sujet aussi, je sais pour toi sur l'éducation. C'est aussi tout le travail que tu fais au cœur de l'industrie alimentaire, sur l'étiquetage qui est un grand sujet en tant que tel, sur le manque de clarté finalement par rapport justement aux fameuses dates de péremption et autre de l'industrie alimentaire, et puis sur d'autres sujets aussi, au cœur du secteur agricole. Et je crois que tu as un rôle de coprésidente du fonds de soutien aux producteurs notamment. Et voilà, plein de choses. Donc aujourd'hui, finalement, Lucie, en 2023, comment vois-tu ton rôle entre celui de Chief Expansion Officer, je crois que c'est le titre officiel de CEO de Chief Expansion Officer, j'adore le titre d'ailleurs. Parce que c'est vraiment croissance à la fois économique et de l'impact de Too Good To Go au cœur du fonctionnement de son entreprise, son développement. Plus de 1200 personnes aussi dans l'entreprise. Et puis aussi le désir très fort que j'ai ressenti en toi, on en a encore parlé juste avant ce podcast, d'avoir un impact finalement beaucoup plus systémique au niveau des politiques publiques. Sur des plaidoyers aussi de grande ampleur. Ça touche à l'éducation, ça touche au monde de l'entreprise à impact. Alors voilà, comment te vois-tu aujourd'hui, non pas à la croisée des chemins, parce que ce sont tous de très beaux chemins, mais comment trouver cet autre équilibre finalement sur ces grands choix ?

 

LUCIE BASCH: Ben justement, c'est le toujours plus qui revient où j'ai tendance à avoir envie de beaucoup de directions différentes, justement. J'ai la chance aujourd'hui d'avoir une super équipe chez Too Good To Go qui a vraiment bien, qui fait tourner la boîte et qui a et qui gère ces développements futurs. Donc moi ça me lasse aussi, enfin, je dirais après après sept ans, l'opportunité de ne plus faire que Too Good To Go parce que c'est une aventure tout à fait incroyable, mais qui prend aussi énormément d'énergie, de temps et de place dans ma vie. Et donc c'est vrai qu'au retour des États-Unis, j'ai aussi eu envie de m'attaquer à d'autres sujets. On en parlait, mais le monde agricole, je pense que c'est un monde en souffrance, essentiel à nos vies, à tous. On parle des gens qui nous nourrissent et qui sont rémunérés de manière totalement dérisoire pour certains. Donc je pense que c'est important d'aller trouver des solutions aussi dans ce monde, même si c'est un monde complexe qui est un monde très régional aussi. On ne peut pas avoir des solutions qui passent à l'échelle aussi facilement qu'un Too Good To Go peut-être. Donc c'est d'autres challenges, d'autres complexités. Moi, je suis passionnée par apprendre. Donc là je suis parti effectivement deux semaines à la rencontre des agriculteurs et pouvoirs apprendre de leur métier, me rendre compte de la complexité du métier d'agriculteur. Entre pouvoir produire de l'alimentation pour le bétail, entre gérer le vivant et en fait le vivant, c'est sept jours sur sept, 24 h sur 24. Donc, accepter que c'est des rythmes totalement différents que nous qui parlons de semaine de quatre jours ou de diminuer le nombre d'heures de travail.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Ils n'ont pas ce luxe-là.

 

LUCIE BASCH: On n'est pas sur les mêmes sujets.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Pas du tout.

 

LUCIE BASCH: Donc, il y a plein de choses à réinventer dans ce sens. Et puis tu le disais, effectivement, l'impact sociétal de manière générale, voire l'entreprise comme un vrai véhicule à un impact, je pense que c'est quelque chose qui me donne à moi beaucoup d'espoir sur le fait qu'on va pouvoir changer les choses assez rapidement. C'est si on arrive à faire que toutes nos entreprises se donnent comme mission principale d'améliorer les sujets dont elles s'emparent. Et donc voilà, essayer de réussir à m'organiser pour continuer à aider Too Good To Go du mieux que je peux, mais en reconnaissant que je ne suis plus un parent unique. Il y a 1200 parents qui s'occupent du bébé. Et puis. Et puis en même temps, effectivement, pouvoir apporter ce que j'ai appris à d'autres entreprises comme : c'est qui le patron, par exemple. Et puis effectivement, pouvoir utiliser le réseau que Too Good To Go m'a permis de construire et les ressources de manière générale, les mettre à bon escient pour pour maximiser encore davantage l'impact.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Sur ces très beaux sujets. Alors justement, quelles seraient peut être les, alors c'est toujours difficile, deux ou trois leçons de leadership qui t'ont le plus marqué ? Positive comme peut-être aussi douloureuse. Mais alors, tu viens de nous en parler.

 

LUCIE BASCH: Mais c'est ça...

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Très très forte. Mais il y en a des très positives aussi que tu as vécu, j'imagine.

 

LUCIE BASCH: Complètement.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Donc...

 

LUCIE BASCH: Je dirais que sur la première qui est peut-être un peu négative, c'est que la spontanéité n'est pas toujours bonne à garder, notamment quand la boîte se développe et que tu n'as plus une relation directe avec chacun des salariés. Et en fait, plutôt que d'essayer, moi j'ai essayé pendant les, au bout de 200 je voulais encore connaître les prénoms de tout le monde et je voulais encore avoir une relation et un impact sur la vie de chacun, être impliqué dans le recrutement de tous. En fait non. Enfin, je pense qu'il ne faut pas essayer. Il faut reconnaître que c'est juste une posture différente que tu dois adopter en fonction de la taille de l'entreprise et rester toi même, mais en comprenant que tu ne peux pas être sans filtre totalement. Une deuxième leçon, c'est qu'être leader, c'est un job incroyable. Moi je trouve que ça... L'impact que tu as dans la vie des gens, c'est à la fois une vraie responsabilité qui pèse lourd sur les épaules de temps en temps, mais aussi une opportunité incroyable de vraiment aller jusqu'à changer la vie des gens, même si c'est un peu prétentieux de le dire comme ça. Mais il y en a qui m'ont dit qu'ils c'étaient totalement développés, retrouvés, connus chez Too Good To Go et qu'ils avaient l'impression de pouvoir arriver en étant eux même au travail.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Et ça donne satisfaction.

 

LUCIE BASCH: Et c'est la meilleure reconnaissance qu'on puisse te donner. Donc je pense que voilà, il faut, il faut le vouloir parce que ce n’est pas simple. Mais voilà, quand tu as une énergie de folie, ça se transmet directement aux autres et ça donne de l'énergie. Et en même temps, les jours où ça ne va pas, vaut mieux ne pas venir au bureau de temps en temps parce que tu peux plomber tout le monde aussi très rapidement.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Ce dernier point me touche tout particulièrement. Je crois fortement à l'importance de gérer sa propre énergie positive de façon à être au mieux de sa forme pour faire face à chacun de nos engagements, professionnels comme personnels. Gérer son temps est une chose, mais gérer son énergie, c'est n'a rien à voir. La différence ne se limite pas simplement à aller au bout des choses qu'on avait à faire. Ce qui compte, c'est d'investir et de donner le meilleur de soi même à vos tâches qui sont les plus importantes dans votre vie. Gérer son énergie, c'est comme gérer son effort comme un athlète le fait. C'est aussi vous autoriser à structurer votre journée de façon à ce qu'elle vous apporte de l'énergie dont vous avez besoin du matin jusqu'au soir. Cela peut passer par sortir, faire quelques pas, tout simplement pour se détendre ou prendre des courtes pauses pour vous aider à récupérer davantage d'énergie, à respirer, être plus productif. Parce que l'énergie positive est une chose qui se diffuse aussi. C'est contagieux, mais c'est une bonne contagion. J'ai été frappé vraiment par ton énergie positive, pas simplement le sourire, mais voilà les vibrations positives qu'on ressent, la passion, la mission qui est chez toi à fleur de peau. C'est quoi tes pratiques si tu en a au quotidien pour toi et la manière dont toi et auprès de tes équipes finalement tu essaies de propager à la fois pas simplement tes pratiques, mais la manière d'apporter la meilleure version de Lucie quand tu les rencontres.

 

LUCIE BASCH: Ça a pas mal évolué ces derniers temps et j'ai toujours cette phrase de ma grand-mère quand j'étais petite, elle disait : quand je me regarde dans le miroir, je vois ma meilleure amie. Et je ne comprenais pas trop ce qu'il disait. Et finalement je me suis rendu compte que la personne avec qui on va passer l'intégralité de sa vie, quoi qu'il arrive, c'est soi même. Et c'est vrai que du coup, je passe désormais plus de temps à entretenir ma relation avec moi même. Avant, je n'avais pas une soirée toute seule, j'étais tout le temps entourée de plein de personnes parce que j'adore les gens, quitte à me délaisser un peu moi même. Et donc j'ai décidé de réentretenir cette relation avec...

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Donc tu prends du temps avec toi même, pour toi.

 

LUCIE BASCH: Oui, tout à fait. Et puis je me demande plus qu'est ce que j'ai envie de faire. Je me fais davantage de compliments aussi. Il y a une vraie relation d'amitié qui est en train de se nouer avec moi même et je pense que c'est hyper important et c'est une nouvelle dimension, j'avoue que j'explore tout à fait.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Superbe. C'est très bien de le dire. Parce qu'il y a plein d'entrepreneurs, d'entrepreneuses au sens large qui souvent s'oublient trop dans la poursuite, la passion que l'on a.

 

LUCIE BASCH: Mais surtout quand on est extravertie en fait. On est tellement intéressés par les autres qu'on s'en oublie soi même.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Alors pour finir, parce que là, ça sera vraiment la dernière question, je souhaiterais partager avec toi en fait le témoignage d'une jeune entrepreneur, une jeune fille de la communauté Live For Good. Donc, qui est cette association que j'ai créée il y a quelques années, qui s'appelle Claire Petros. Et Claire, elle a fondé Les Pépites Vertes. C'est un média, une communauté qui vise à équiper les jeunes talents de la transition écologique.

 

LUCIE BASCH: Super projet.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Voilà un très beau projet. Et Claire, elle a écrit récemment sur LinkedIn un post que j'ai adoré, alors, je l'ai commenté, qui dit la chose suivante : aujourd'hui, je fais un pas de plus vers moi-même, en assumant cette nouvelle étape de ma vie, ce nouveau rôle, cette nouvelle mission. Je suis une cheffe avec deux F E, et ce n'est pas grave. Non-pardon, je refais. Je suis une cheffe et j'assume avec fierté. Et pour toutes les cheffes en devenir et pour toutes celles en poste, je suis une cheffe et c'est OK. J'ai adoré ce poste. Alors toi qui est devenue une cheffe il y a déjà pas mal d'années, tu as démarré vraiment jeune, à la tête vraiment de l'un des plus beaux succès de l'entrepreneuriat à impact au niveau mondial, que dis-tu à toutes ces jeunes femmes de tous horizons qui n'osent pas encore assumer leur posture de cheffe pour qu'elles deviennent elles-mêmes des leaders positives qui peuvent changer le monde ?

 

LUCIE BASCH: C'est une bonne question. C'est vrai que ce n’est pas simple et en même temps, on se le doit à nous-mêmes et on le doit aux autres, je pense, parce qu'on a une vraie place à prendre. Je pense que le monde s'en tirerait aussi encore mieux si on avait davantage de cheffes deux F E. Donc on a cette responsabilité aussi, en tant que femme, de vraiment prendre les rênes. Et donc je pense que l'idée c'est d'y aller et de ne pas hésiter, quoi. Oser, ne pas trop se poser de questions, ne pas prendre confiance en soi et être fière d'avoir confiance en soi. Je pense que c'est une nécessité aujourd'hui et que finalement faut y aller parce que ça ne fait pas trop mal.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Non, ça fait pas mal. Tu es un très bel exemple, dis le, il faut le dire très fort.

 

LUCIE BASCH: Voilà.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Vous écoutiez le podcast Postive Leadership avec Jean-Philippe Courtois. Si vous avez aimé l'épisode d'aujourd'hui, merci de me laisser un commentaire ou une évaluation et puis surtout d'en parler autour de vous. Faites-nous connaître. Si vous souhaitez recevoir davantage de conseils pratiques pour savoir comment intégrer des principes de leadership positif dans votre vie, inscrivez-vous à ma newsletter mensuelle gratuite, Positive Leadership & You. Et bien, écoute, c'est une superbe conclusion. 1000 1000 mercis de tout ton temps et de tout ce que tu as pu nous donner pendant cet épisode Lucie, et tout ce que tu vas continuer à donner aux agriculteurs, au monde de l'éducation, au monde de l'impact en général et au plaisir de te rejoindre peut-être sur un certain nombre de ces routes ensemble.

 

LUCIE BASCH: Un grand plaisir.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: Merci Lucie.

 

LUCIE BASCH: Merci beaucoup.

 

JEAN-PHILIPPE COURTOIS: En attendant le prochain épisode, je vous dis au revoir.