Positive Leadership
Positive Leadership
Devenez l'entrepreneur de votre vie (avec Hapsatou Sy)
Si vous parvenez à cultiver votre force de caractère, vous pouvez prendre votre destin en main et devenir l'entrepreneur de votre propre vie.
JP's dernière invitée, Hapsatou Sy, est l'expression parfaite d'une self-made woman. Entrepreneuse de renom et présentatrice dans les médias, elle a créé des entreprises dans divers secteurs afin de permettre aux femmes de prendre leur destin en main.
Cet épisode regorge d'idées et de conseils inspirants. À écouter dès maintenant.
Subscribe now to JP's free monthly newsletter "Positive Leadership and You" on LinkedIn to transform your positive impact today: https://www.linkedin.com/newsletters/positive-leadership-you-6970390170017669121/
Jean-Philippe Courtois :
Bonjour et bienvenue à Positive Leadership, le podcast qui vous aide à grandir en tant que personne, en tant que leader, mais aussi en tant que citoyen du monde. L'expression « self-made woman » aurait pu être inventée pour mon invitée du jour. Elle est bien connue du public français, c'est une entrepreneuse reconnue, émérite, qui a mis les mains à la pâte depuis le premier jour. Et au cours des 20 dernières années, elle a créé des entreprises dans des secteurs différents, comme la beauté, la mode et bien d'autres encore que nous allons découvrir. Et la plupart de ces entreprises, en tout cas ces différentes initiatives, ont eu pour objectif d'autonomiser la vie des femmes et de leur donner les outils pour gérer, assumer leur propre destin.
Hapsatou Sy :
Donc, être entrepreneur de sa vie, c'est prendre à 100 % cette liberté à laquelle on a le droit. Et c'est d'accepter à 100 % tout ce qu'elle amène avec elle. Donc, les échecs, les difficultés, les rencontres, les conseils, les critiques et tout ce qui va avec. Mais en tout cas, à la fin, mourir comme Piaf en se disant non, je ne regrette rien.
Jean-Philippe Courtois :
C’est vraiment fascinant de s’assoir avec Hapsatou pour découvrir comment elle a tracé sa propre voie en tant que femme d’affaires accomplie et présentatrice de télévision et de médias aussi, et comment, forte de ses origines africaines, elle a étendu ses activités sur le continent africain.
Hapsatou Sy, je suis tellement heureux de te recevoir dans ce podcast du leadership Positif.
Hapsatou Sy :
Je suis absolument ravie d'être à tes côtés également.
Jean-Philippe Courtois :
Voilà, alors en te rencontrant, on a eu l'occasion de se rencontrer, en t'écoutant et en voyant un certain nombre de tes interviews, j'ai été frappé par le nombre de fois où tu faisais référence à des moments charnières de ta vie, pendant lesquels ton père et ta mère, évidemment, on joué un rôle essentiel et jouent un rôle essentiel. Petite, tu accompagnais d'ailleurs ton papa tous les matins quand il partait travailler à 5 h 50. Alors, est-ce que tu te rappelles, pour commencer, ces matins-là ? Et qu'est-ce qui te poussait, toi, petite, à te lever si tôt, à prendre la main de ton papa ? Quelles sont les images et quel est l'héritage que tu as gardé de ces matins ?
Hapsatou Sy :
Je m'en souviendrai toute ma vie. D'abord, je me souviens de la poignée de main de mon père. Je me souviens de ses mains de travailleur, ses mains qui étaient pleines de puissance et de force. Et effectivement, je me souviens que tous les matins, j'étais avec lui sur le pas de la porte. Je le voyais prêt à aller travailler. J'enfilais mes petites chaussures et je le suivais. Il travaillait pas loin de la maison, donc je l'accompagnais. Il me donnait une pièce de 5 francs ou de 10 francs parfois. Début de mois, c'était plutôt 10 francs. Milieu, fin de mois, c'était plutôt 5 francs. Une pièce dont je me souviens qu'elle était énorme dans ma main. Elle était énorme, cette pièce de 5 francs. J'en ai revu une récemment et en fait, elle est petite. Mais moi, elle me paraissait énorme. Et en fait, c'était un peu le symbole de ce chemin que je prenais tous les matins avec mon père pour me rappeler qu'il n'allait pas travailler que pour lui-même, mais pour nous. Et je ne sais pas pourquoi, j'ai eu cette maturité très tôt. J'avais conscience qu'il fallait que je l'aide. Donc, j'étais là.
Jean-Philippe Courtois :
Ce sont sûrement de superbes images qui reviennent, j'imagine, dans ta vie de temps à autre comme on en a pour chacun d'entre nous. Et ton papa, mais aussi ta maman qui, malheureusement, a disparu, je crois, l'an dernier, ont façonné, clairement, on l'entend, on le voit, et tu vas nous en parler, des valeurs essentielles pour toi. Des croyances aussi, des vécus au sein d'une famille de huit enfants. Alors, est-ce que tu peux nous raconter un peu l'origine de tes parents, d'abord ? Comment ils ont réussi à t'élever, parce que ce n'est quand même pas évident avec huit enfants, dans une tour de Chaville ?
Hapsatou Sy :
Ma mère est une femme admirable. Tu vois, je parle d'elle au présent parce qu'elle est toujours là dans ma vie. Je me souviens de chaque valeur, de chaque conseil qu'elle a pu me donner. Ma maman, elle est mauritanienne. Elle a été mariée à 13 ans, elle ne savait pas lire ni écrire. Et ça n'a pas impacté la détermination et la force de cette femme que j'ai vue élever huit enfants à la maison. On n'a jamais manqué de rien et en plus, elle allait travailler. En plus de ses enfants, elle en gardait d'autres. Elle faisait des ménages. Elle faisait tout ce qu'il fallait pour qu'on reste dignes et qu'on ne manque de rien. J'ai une admiration immense pour elle. Quand on parle des héros du quotidien, moi, les miens, ils étaient tout près de moi, mes parents.
Donc, mon papa, lui, vient de Orkadiere, un village du Sénégal dans le Fouta, c'est le nord-est du Sénégal. Et mon père, pareil, m'a transmis les valeurs de travail, de dignité, de respect, de résilience. Je n'ai jamais vu mon père se plaindre. Je l'ai toujours vu debout, fier et digne. Voilà, il allait travailler, gagner son salaire et tout faire pour que nous ne manquions de rien. Tout en tenant et en soutenant la famille en France, il soutenait également la famille en Afrique. Parce que ça ne s'arrêtait pas juste à Chaville. Ça ne s'arrêtait jamais, en fait. Parce que vraiment, aider son prochain prenait tout son sens. Donc, non, j'ai eu des parents… Moi, je dis tout le temps, on me disait, tu viens d'un milieu modeste. Et moi, je disais, je viens d'une des familles les plus riches de France. Vous ne vous rendez pas compte de la valeur de tout ça.
Jean-Philippe Courtois :
Et cette richesse, tu le dis de ta famille aussi, de tes origines, tu as pu les ressentir avec ces liens à la fois au Sénégal, en Mauritanie, petite, avec tes frères et sœurs.
Hapsatou Sy :
Alors, moi, je suis partie très tard. Je suis retournée très tard. C'est bizarre de dire retournée dans un pays où tu n'as jamais été. Mais en 1998, donc, j'avais déjà quasiment… c'était à l'aube de mes 18 ans. Mais j'ai eu l'impression de revenir parce que les valeurs qui m'avaient été transmises venaient vraiment de là-bas, en fait. Et je l'ai vraiment senti. Et oui, j'ai grandi avec… On a grandi d'abord dans une double culture. Mes parents me parlaient peul, donc je le parle couramment. Et on a grandi dans une double culture où on embrassait pleinement le pays d'origine de mes parents. Pour mon père, c'était très important, ce pays qui l’avait accueilli. Il avait un immense respect pour ça. Et je pense qu'il nous l'a transmis avec beaucoup de force. Donc, oui, j'ai grandi avec ces valeurs-là ancrées en moi.
Et récemment, justement, quand je suis retournée au village pour l'enterrement de ma maman, j'ai senti à ce moment-là ce qu'étaient ces valeurs humaines. Ça a été absolument extraordinaire. Je me suis rendu compte que quand on part, quand on quitte ce monde, ce qu'on laisse, c'est des souvenirs dans les mémoires. Et c'est ça qui est essentiel. On ne part pas le plus riche du cimetière. Ce n'est pas intéressant.
Jean-Philippe Courtois :
Non, c'est ce qu'on laisse durablement dans les esprits et les cœurs de toutes les personnes qu'on a aimées et qu'on a aidées à grandir dans sa vie.
Alors, toi, tu as commencé vraiment, Hapsatou, à prendre ton destin en main toute petite, on en a parlé tout à l'heure, tu étais petite, 5 h 50, tu accompagnais ton papa. Mais après, à 12 ans, en fait, tu commences à gagner plus d'argent que ton papa, ce qui paraît incroyable. Est-ce que tu peux nous raconter comment tu crées ton premier business quelque part et ton rapport à l'argent alors que tu n'étais qu'une enfant ?
Hapsatou Sy :
Mais je n'étais pas petite, je faisais plus d'un mètre trente. Effectivement, j'étais la plus riche du quartier. Tous les soirs, je me souviens, j'habitais donc une tour de 18 étages. Et j'allais, je faisais le tour de la maison de retraite qui était du premier au septième. Et j'allais voir toutes les personnes âgées qui me confiaient leur liste de courses. Et je partais, j'avais mes caddies et je faisais méthodiquement toutes les courses de ces personnes âgées. C'était un super business. Et je revenais et on me donnait des pièces de 2 francs, 5 francs, 10 francs. Et j'avais des bocaux avec mes pièces stockées dedans. Et c'est marrant parce que quand je reparle aux jeunes avec qui j'ai grandi de ma génération, ils se souviennent tous d'Hapsatou qui poussait trois caddies. Un sur 100 mètres, puis le deuxième sur 100 mètres, puis le troisième sur 100 mètres. Et ainsi de suite jusqu'à la maison. Et voilà, je me souviens effectivement de ces moments-là qui peuvent paraître des moments difficiles et qui pour moi ne l'étaient pas. J'ai des souvenirs formidables d'indépendance, d'avoir l'impression d'être déjà une businesswoman. Voilà, j'ai des souvenirs heureux de ça.
Jean-Philippe Courtois :
Et toutes ces pièces de 5, de 10 francs ou autres, tu les as mises quelque part ? Tu as commencé à épargner, à mettre ça de côté parce que ça devait être aussi convoité par tes frères et sœurs, peut-être parents, je ne sais pas. Ou c'était respecté, c'était ton épargne à toi ?
Hapsatou Sy :
C'était une épargne, disons, encore une fois très méthodique. D'abord, je les dispatchais dans des pots différents en me disant s'il y en a un qui est découvert, au moins je garde les autres. Et ensuite, effectivement, ils avaient une utilité importante.
Il y a une partie qui servait pour les courses alimentaires, une partie qui aidait pour vraiment le soutien familial, tout ce qui était courses scolaires, etc. Et puis, ce qui restait, c'était vraiment pour le plaisir. Pour mes frères et sœurs.
Jean-Philippe Courtois :
Pour tes frères et sœurs aussi, d'accord.
Hapsatou Sy :
Je voulais qu'ils aient des joggings de marque comme les autres, pour qu'ils n'aient pas envie de voler finalement. Et qu'ils soient habillés comme nous tous, comme les autres gamins de notre âge. Je dis nous tous parce que je me suis offert mes propres plaisirs assez tôt, mais c'est vrai que je pensais d'abord à mes frères et sœurs.
Jean-Philippe Courtois :
Oui, c'est incroyable d'essayer de visualiser cette histoire avec ces récipients remplis de pièces et déjà une super organisation, visiblement, la distribution d'allocations de ressources.
Hapsatou Sy :
J'en avais beaucoup des pièces, beaucoup, beaucoup de pièces.
Jean-Philippe Courtois :
C'est à l'époque où on avait beaucoup de pièces dans les poches, c'est vrai. Alors, très tôt, tu décides de devenir une businesswoman. Qu'est-ce qui a fait germer dans ton esprit l'idée de devenir une businesswoman ? Et c'est quoi, d'ailleurs, une businesswoman ?
Hapsatou Sy :
Pour moi, ça prend tout son sens, ce mot. Je disais : « Je veux être une businesswoman. » On me disait : « Non, mais donc tu veux être chef d'entreprise. » Je disais : « Non, une businesswoman. » On me disait : « Oui, bon, la traduction, c'est chef d'entreprise. » Je disais : « Ce n'est pas la bonne traduction parce que chef d'entreprise, c'est conquérir la France, businesswoman, c'est conquérir le monde. » Et moi, je voulais conquérir le monde. Je rêvais de conquérir le monde. Donc, effectivement, je voulais être businesswoman. Et pour moi, businesswoman, c'était d'abord être libre. C'était pouvoir être libre de pouvoir faire ce qu'on voulait, ce qu'on avait envie de faire. C'était voyager, c'était fédérer, c'était créer des équipes, c'était être assise dans un bureau avec un tailleur un peu comme Oprah Winfrey. Voilà, c'était ça. Et en même temps, c'était être ma mère aussi, une femme forte et puissante. Donc, c'était un mélange de tout ça.
Jean-Philippe Courtois :
Mais qu'est-ce qui t'a inspiré cette idée, en fait, Hapsatou ?
À l'époque, il n'y avait pas les séries américaines. Je ne sais pas. C'est quoi, en fait ?
Hapsatou Sy :
Tu as raison de parler des séries américaines parce qu'à l'époque, à part Arnold et Willy, Le Prince de Bel-Air est arrivé un peu plus tard. Arnold et Willy, ils étaient adoptés, donc, ce n'était pas la super histoire dont je rêvais. Non, moi, ce qui m'a donné envie de ça, c'est que je voyais qu'il y avait des gens qui étaient capables d'écrire leurs rêves et je ne voulais pas que la société l'écrive pour moi. Je voulais écrire ma propre histoire. Et cette histoire, j'avais pioché à gauche, à droite, tout ce dont je rêvais. J'avais un cahier des rêves. Et je mettais dessus des images. Des images qui m'inspiraient ce que je souhaitais faire. Aujourd'hui encore, à presque 43 ans, j'ai toujours un cahier des rêves. Et je te raconterai une anecdote avec un chèque incroyable dessus. Mais voilà. Donc, non, non, je rêvais d'être cette businesswoman que je voyais dans les films, dans les séries américaines, qui n'existait pas forcément dans mon entourage. En tout cas, une businesswoman qui me ressemblait. Et donc, quand ça n'existe pas dans ta réalité, tu crées ta réalité. C'est ça.
Jean-Philippe Courtois :
Oui, c'est super. On reviendra tout à l'heure sur ton cahier des rêves parce que j'ai vraiment envie de l'ouvrir, peut-être un petit peu plus tard. Tu nous diras peut-être si tu veux partager ce qu'il y a d'écrit ou de dessiné. Un petit passage rapide, même si ce n'est pas les choses essentielles, on sait dans une vie, mais ça en fait partie, des études. Tu as fait un bac pro en secrétariat. Mais tu n'étais pas faite vraiment pour ça, d'ailleurs. Donc, tu as fait un BTS Commerce International. Et puis, tu as complété tes études aux États-Unis par un stage qui était, à mon avis, pas évident à réaliser à l'époque. Et voilà. Et depuis la tour de Chaville, encore moins probablement.
Donc, parle-moi un peu de cette expérience que tu as eue aux États-Unis, à New York. En quoi cela a-t-il peut-être cristallisé ta pensée et t'a-t-il aidée à écrire tes rêves et à les réaliser, surtout ?
Hapsatou Sy :
Tu aurais détesté m'avoir comme secrétaire, effectivement. Non, écoute, moi, je n'étais pas faite pour ça. J'ai fait un BEP/Bac pro en secrétariat parce qu'à la sortie de ma troisième, il fallait choisir. Rapidement, je suis allée vers le BTS Commerce International. On m'a dit que ça allait être impossible parce que les BEP et Bac pro étaient considérés un peu comme des voies de garage. Et moi, j'ai poursuivi mon rêve de manière très têtue. Puis, j'ai fait un DESS Commerce et Affaires Internationales. Mais ce voyage à New York a été pour moi une révélation. Pour moi, New York, c'est la seule ville au monde où tu arrives, tu essayes de soulever un building, un immeuble. On te dit : « Vas-y, tu peux y arriver. » Tu vois ? Et je trouvais que c'était une mentalité très différente de l'environnement où j'avais grandi, où on me disait toujours que les choses étaient impossibles. Et donc, j'ai adoré l'effervescence de New York. En arrivant à New York, je me suis dit qu'en fait, tout est possible.
Mon premier stage que j'avais trouvé a été annulé. Je me suis retrouvée à arpenter les rues de New York et je suis tombée sur un marchand de chaussures qui a accepté tout de suite de me prendre en stage. Et j'avais été plutôt bonne d'ailleurs en vente. Et voilà, c'est là-bas qu'est né mon rêve. Parce qu'effectivement, je suis passée devant un salon qui s'appelait Ziba, à l'époque, je crois, et qui faisait de la beauté pour toutes les femmes. Et j'ai trouvé incroyable de pouvoir se réunir toutes ensemble. Parce que moi, j'ai grandi avec des copines de toutes origines, et on ne se posait pas la question de est-ce qu'on peut aller se faire belle ensemble ? Et en fait, si. Parce qu'à chaque fois, on arrivait, on disait : « Toi, je peux te prendre, mais toi, je ne peux pas parce que tu as les cheveux comme ci. » Et j'avais trouvé ça génial. Je suis revenue en me disant que j'allais détrôner L'Oréal.
Jean-Philippe Courtois :
Alors, c'est ça l'histoire. C'est ça qui t'a donné l'idée de détrôner L'Oréal. Et tu as créé Ethnicia, je crois, ta première entreprise. Alors, c'était quoi ta vision ? Déjà, détrôner L'Oréal. Mais comment as-tu démarré de rien ou pas grand-chose, je crois à l'Île-Saint-Louis, ce qui paraît encore plus improbable pour les Parisiens qui écoutent ce podcast et les autres qui sont peut-être allés à l'Île-Saint-Louis dans leur vie. Surtout quand les banques n'étaient sûrement pas prêtes à te donner de l'argent. Donc, c'est quoi l'histoire ? Comment as-tu écrit un peu ? Pas le business plan. Enfin, je ne sais pas, l'histoire d'Ethnicia.
Hapsatou Sy :
Tu as raison. Alors, j'ai voulu détrôner L'Oréal. Je n'y suis pas arrivée. Mais je m'étais dit…
Jean-Philippe Courtois :
Pas encore, pas encore.
Hapsatou Sy :
Pas encore.
Mais je m'étais dit, allez, si je fais 1 %, c'est vraiment, vraiment top. C'est déjà bien. Quand je disais détrôner L'Oréal, c'est que j'avais envie de créer à la base des produits. Et pour comprendre les produits, je me suis dit, je vais ouvrir des salons de beauté. Et c'est là que je vais bien comprendre comment ça fonctionne. Et c'est comme ça que je suis devenue d'ailleurs à un moment ambassadrice pour eux, pour Davines et des marques internationales. Mais c'est vrai que moi, je pensais que le financement de mon projet allait se faire un peu comme le pouce, tu sais, dans la publicité de la banque qu'on ne citera pas, qui dit, tu as un projet, tu viens, on te le finance et tout, c'est super. Et en fait, ça s'est avéré beaucoup plus difficile. Et donc, là, c'est une leçon qui m'a été transmise par ma mère. Ma mère, avec ses amis, faisait des tontines. Et avec les tontines, chacun mettait une somme et ça permettait d'investir. Et moi, j'avais mis un peu d'argent de côté. J'ai un ami qui a mis un peu d'argent, Business Angel. C'est comme ça qu'aujourd'hui, je le dirais. Et puis, j'avais 19 000 euros. Et c'est comme ça que j'ai démarré. Alors, l'Île-Saint-Louis, c'est le fruit de l'intuition. Je trouve un local, je te le fais vite, à Châtelet. Je vais voir le propriétaire. Je le tanne pendant trois semaines. Il me dit, OK, c'est bon, on signe. Il arrive, il est là avec son avocat, le contrat préparé et tout. Et j'ai une voix qui me dit, ne signe pas. Ne signe pas. Je rentre chez moi en prenant littéralement la fuite parce qu'ils n'étaient pas contents. J'arrive, je me mets sur PAP et je trouve ce local sur l'Île-Saint-Louis. Mais à l'époque, je ne sais pas ce qu'est l'Île-Saint-Louis. Je ne me rends pas compte du prestige de l'Île-Saint-Louis. Mais je sais que je visite cet endroit et je me dis, c'est le mien. Et j'ai un propriétaire extraordinaire, ça mérite d'être souligné, qui s'appelle Alexandre Hébrard. Je me permets de dire son nom. Qui a été incroyable et qui m'a dit, votre business plan, il est super. Business plan que j'avais fait rue de Rivoli, par temps de pluie et que j'avais fait vraiment système D parce que je n'avais pas la méthodologie pour faire un business plan. Et il décide de me confier les clés, effectivement, de ce local qui deviendra le début de mon histoire. Je me souviens que ce jour-là, je prends le pont Marie. Je me mets au milieu et un peu comme Rose dans Titanic, je crie que je suis la reine du monde. Et c'est à ce moment-là que mon histoire va démarrer. Et c'est fou, parce qu'à chaque fois que j'aurai des interviews, on me dira, mais t'es sur l'Île-Saint-Denis ? Je disais l'Île-Saint-Louis, je suis sur l'Île-Saint-Louis. Et je pense que rien n'aurait été pareil si je n'avais pas été sur l'Île-Saint-Louis. Donc à ce moment-là, je vais voir la banque et je n'ai pas de financement. Et je me débrouille. Et je me débrouille et je fais mes travaux toute seule. Je vais chercher mes meubles. Je les monte. Mes frères arrivent pour m'aider. C'est déjà trop tard. J'ai déjà tout fait.
Voilà. Et je suis déterminée. Je frotte toutes les belles pierres de l'Île-Saint-Louis et j'en fais mon premier salon et c'est comme ça que ça naît.
Jean-Philippe Courtois :
Wow. Et juste quelques mots peut-être pour nous dire, quelle était l'expérience quand on ouvre la porte du salon Ethnicia à l'Île-Saint-Louis, quelques années en arrière ? Ça ressemblait à quoi ? Si on est une cliente qui rentrait, qui découvrait, qu'est-ce qu'on avait comme expérience ?
Hapsatou Sy :
Je peux te dire que c'est une expérience que je n'ai pas revue encore aujourd'hui. En toute humilité. Mais tu entrais, d'abord, tu avais des femmes de toute origine. Donc, tu avais la femme blanche, la femme asiatique, la femme noire, la femme maghrébine, la femme voilée, pas voilée. Tu avais tout le monde. Et ça, c'était extraordinaire. Tu étais en plein milieu de l'Île-Saint-Louis, lieu féerique de Paris, dans des caves voûtées absolument incroyables. Et c'est le seul endroit où tu pouvais avoir un soin des cheveux en même temps qu'un concert de blues, de jazz, où un artiste était là avec son violon et chantait de la soul music. Voilà. C'était ça l'univers d'Hapsatou, ça a été ça dans tous mes salons de beauté. C'était beauté globale et sur mesure. Donc, on faisait de la coiffure, de l'esthétique, du maquillage, du concert en images. On se disait, la femme active, quand elle arrive, elle n'a pas le temps. Il faut qu'elle passe tout au même endroit et en même temps, il faut qu'elle prenne du plaisir. Ça, c'était mon motto. C'était mon envie. Et je crois que j'ai réussi à le faire passer pendant pas mal de temps.
Jean-Philippe Courtois :
Pendant pas mal de temps. Je sais que tu as développé, tu as développé. Ça a beaucoup grandi. Puis un jour, malheureusement, la boîte a dû être placée sous administration et liquidée en 2013. Alors, je sais que de nos jours, en 2023, 2024, même, on parle des échecs comme justement aussi des leçons. Quelles sont, toi, tes trois leçons que tu as retirées et que tu as peut-être adoptées maintenant comme règles fondamentales pour toutes tes entreprises, toutes tes initiatives dans lesquelles tu te lances, Hapsatou ?
Hapsatou Sy :
D'abord, que l'échec, ce n'est pas grave. Au contraire. C'est une expérience de plus.
L'échec, moi, j'espère en avoir tout au long de ma vie parce que ça veut dire que je tente des choses nouvelles, que je ne maîtrise pas. Mais je vais vers cette excitation dont j'ai besoin, moi, qui m'est vitale. La deuxième leçon que j'ai apprise de l'échec, c'est que c'est une réussite différée. Tu vois ? C'est comme un sportif. Tu tentes. Parfois, tu y arrives, parfois, tu n'y arrives pas. Et puis, un jour, le coup, il part et il est formidable. Et le lendemain, tu ne joues pas très bien. Je pense un peu au golf, je pense au tennis, je pense à plein de choses comme ça. Et ça, il faut l'accepter. Mais ce que te laissent ces expériences-là, c'est inégalé. C'est absolument formidable. Je n'aurais jamais appris autant si j'avais été dans le salariat, j'aurais appris différemment, mais je n'aurais pas appris autant. Et ça, c'est ce que j'ai appris. Et la troisième leçon, c'est que l'échec t'apprend l'humilité. L'humilité de dire, je ne suis pas infaillible. Je ne suis pas une wonder woman. J'ai le droit d'échouer. Parce qu'en France, aujourd'hui, on n'a pas le droit d'échouer. Quand tu échoues, on te pointe du doigt. Tu es convoqué au tribunal comme si tu étais un criminel alors que tu as juste tenté des choses et que tu as le droit d'échouer. C’est comme dirait un enfant, tu marches, mais tu n’as pas intérêt à tomber, en fait. Et moi, je ne crois pas en ça.
Je crois que l'échec m'a appris des choses absolument formidables. Et je peux te dire qu'un peu comme la mort, je n'ai plus peur de l'échec. Et je n'ai jamais eu peur de l'échec. En fait, je crois que quand tu n'as rien à perdre au début, tu n'as jamais peur de l'échec. Parce que ce qui nous fait peur dans l'échec, c'est de perdre du matériel en réalité. Et le matériel n'a pas la même importance quand tu n'avais rien, en fait.
Jean-Philippe Courtois :
Bien sûr.
Non, non, superbe leçon à méditer pour tous ceux et celles de nos auditeurs qui sont des entrepreneurs dans leur vie, d'ailleurs, au sens large du terme. L'entrepreneuriat, ça peut être très dur aussi. Tu sais que moi, au sein de mon association, Live for Good, on accompagne plein de jeunes entrepreneurs dans la transition sociale et environnementale. Et des fois, il y a des situations de burn-out très compliquées parce qu'on se donne à fond pour sa cause, pour son initiative, pour changer le monde ou pour son entreprise. Et toi, un jour, tu te retrouves sur la place de la Concorde sans savoir où tu es, en plein burn-out. Et il y a un appel de ton père qui va littéralement te ressusciter. J'utilise ce mot parce qu'il est fort, mais je crois que c'est un peu le cas, tu l'as dit. Est-ce que tu peux nous raconter cette scène qui, j'imagine, vit encore très fortement dans ton cerveau très fortement, les images que tu en as ? Cet appel, cette voix de ton père, qu'est-ce qu'il t'a dit et en quoi ça a modifié ta vie ?
Hapsatou Sy :
Il m'a ressuscité. Je crois que tu as utilisé vraiment le terme parfait. On ne me l'a jamais dit depuis que je raconte cette histoire et je crois que c'est vraiment cette symbolique-là. Donc, merci pour ça déjà. Et je suis ravie juste pour ça. Je suis ravie de faire ce podcast ce matin parce qu'il m'a ressuscité. Ça veut dire qu'à ce moment-là… tu sais, à un moment, tu te convaincs que tu vas y arriver, tu vas y arriver, tu vas y arriver. Sauf que ton corps, il te dit à un moment…
Jean-Philippe Courtois :
Toute seule.
Hapsatou Sy :
Vas-y toute seule, parce que je ne vais plus te porter. Je ne te suis plus. Je ne peux plus, en fait, en réalité. Et ce jour-là, je suis dans un épuisement total. Je suis complètement inconsciente. Je ne veux pas écouter. Ce n'est pas que je n'entends pas, c'est que je ne veux pas écouter. Et je quitte l'île Saint-Louis. Et je ne sais pas ce qui s'est passé, mais une heure de temps s'est écoulée entre le moment où… Je ne quitte pas l'île Saint-Louis, pardon. J'arrive sur l'île Saint-Louis et mon salon, je le vois, il est à 100 mètres. Je dois aller me garer. Et en fait, je reprends conscience. Je suis place de la Concorde et je mets ma tête…
Jean-Philippe Courtois :
Tu ne t'es jamais garée ?
Hapsatou Sy :
Je ne me suis jamais garée. Je ne sais pas vraiment ce qui s'est passé, mais je sais que ça a duré à peu près une heure parce que le dernier appel passé, c'est ma mère. Et donc, je sais que ça a duré à peu près une heure. Et là, je mets la tête dans le guidon et je commence à pleurer. Mais des larmes… je n'imaginais pas que mon petit corps puisse contenir autant d'eau. Je le dis vraiment, je pleure, je pleure, mais je ne sais pas pourquoi je pleure. Tu sais, comme un épuisement absolu. Et je rentre chez moi et je me terre et je pleure, je pleure, je pleure. Et à ce moment-là, mon père m'appelle. Mon père, c'est mon meilleur ami. Mon père, on se parle tous les jours de ma vie. Et si je ne lui parle pas, c'est une journée ratée. Il y a un problème. Et en fait, mon père m'appelle et me dit, Hapsatou, est-ce que tu vas bien ? Et je lui dis, oui, oui, oui, ça va. Tu vois, je prends le petit côté, je me mens à moi-même et je lui dis, je vais bien. Il me dit, alors, je vais t'expliquer un truc. D'abord, tu voulais que je sois fier de toi. Je suis fier de toi, c'est bon. Mais maintenant, tu vas commencer à vivre pour toi. Il dit, tu sais, ça fait trois jours que j'essaie de te joindre. Mon père, il faut savoir qu'il venait dans mes salons. Dès qu'il ne me voyait pas, au bout de deux jours, il débarquait avec son grand boubou et il saluait tout le monde dans mes salons. Je lui disais, mais on ne fait pas comme ça en France, on ne salue pas tout le monde. Et il me disait… et en plus, il allait voir les clients, il disait, comment ça va ? La famille, ça va ? Les enfants, ça va ? Et je disais, mais papa, on ne fait pas ça. Et il me disait, mais si les gens ne sont pas normaux, ce n'est pas mon problème. Et ça, j'adore cette phrase. Et mon père me dit, tu sais, ma fille, ça fait trois jours que j'essaie de te joindre et que je n'y arrive pas. Viendra un jour où tu essaieras de me joindre et tu ne pourras pas. Cette phrase m'a littéralement ressuscitée, a remis au centre de ma vie, les valeurs qui étaient les miennes et celles transmises par mes parents. Et je me suis souvenu qu'à un moment, je courais après quoi ? Après du matériel, donc après rien et qu'il fallait que je me recentre très, très vite sur l'essentiel et que je commence à vivre. Et en fait, à l'époque, tu sais, je passais à la télé, c'est super, tout le monde te disait, waouh, tu as réussi ta vie et moi, je ne considérais pas l'avoir réussi. J'avais des huissiers tous les matins. J'avais des problèmes tous les matins. Je n'arrivais pas à payer mes factures. Mais j'étais dans cette tour imaginaire où tout le monde pensait que c'était formidable. Et en fait, j'étais dans une prison dorée. Et donc là, ce jour-là, les mots de mon père m'ont littéralement ressuscitée. Merci, merci de m'avoir trouvé ce terme.
Jean-Philippe Courtois :
Non, mais c'est incroyable de voir le pouvoir aussi des mots des personnes qu'on aime et qui nous aiment tant, notamment nos parents, son père, sa mère. Et ce mot de la fierté pour un enfant, il est tellement fort et il peut porter tellement d'énergie après dans la vie de cet adulte quand il va grandir. Il n'est jamais trop tard pour le dire, d'ailleurs. Ce n'est pas une question d'âge.
Alors, dans l'une des éditions précédentes de mon podcast, j'ai parlé au professeur Herminia Ibarra, qui est auteur d'un très beau livre qui s'appelle Working Identity. Et en fait, dans ce livre, elle parle du fait d'être l'entrepreneur de sa propre vie, ce qui, par coïncidence, d'ailleurs, est le titre d'une conférence TED que tu as donnée il y a quelques années, parce que c'est vraiment un thème fort. Et Herminia soutient que la connaissance est le résultat de l'action et de l'expérimentation. La transition de carrière n'est pas un chemin rectiligne, dit-elle, vers une identité prédéterminée, mais un voyage tortueux au cours duquel nous essayons une multitude de moi possibles. Donc, c'est en faisant qu'on apprend qui on est et ce qu'on va devenir. Et ce n'est pas en se posant la question tous les matins sans se résoudre à l'action. Alors, pour toi, qu'est-ce que ça signifie d'être l'entrepreneur de ta propre vie ? Et quel est le lien avec la perception que tu as de toi-même, finalement ?
Hapsatou Sy :
D'abord, je trouve cette définition parfaite. Je trouve qu'elle est vraie, elle est complète. Moi, pour moi, être entrepreneur de sa propre vie, c'est se lever et décider de son destin. Tu sais, c'est cette phrase de William Henley, être capitaine de son âme, maître de son destin. C'est-à-dire, c'est prendre des décisions et les assumer. C'est se dire que ça va être difficile. C'est se dire que quand on veut quelque chose de grandiose, comme dit très bien mon père, petit problème, petit quelqu'un. Grand problème, grand quelqu'un. Et petit projet, petit quelqu'un. Grand projet, grand quelqu'un. Donc, si tu veux des grands problèmes, tu vas aller vers des grands projets, mais derrière, il faut assumer.
Jean-Philippe Courtois :
Et donc, pour toi, être entrepreneur, c'est fondamentalement une question de liberté. C'est ça ? C'est un mot qui est important, qui revient dans ce que tu dis.
Hapsatou Sy :
Oui, ça, c'est le truc, je suis intransigeante là-dessus. Pour moi, être entrepreneur, c'est être libre et c'est après ça que je cours. Je cours après cette liberté, en fait. Aujourd'hui, j'ai compris, je ne cours pas après le matériel. Je ne cours pas après la reconnaissance ni la notoriété. Je cours après cette liberté. Voilà. Moi, c'est celle qui me nourrit, me stimule au quotidien.
Jean-Philippe Courtois :
Et c'est la liberté, notamment, de t'accomplir, de te remplir de belles choses ou de choses qui te font grandir et qui te permettent d'avoir un impact plus important auprès des autres, en Afrique, en France ou ailleurs, d'ailleurs ?
Hapsatou Sy :
Oui. Écoute, tu vois, je viens d'arriver au Sénégal. On a connu quelques difficultés. Il y a eu l'élection présidentielle récemment. Donc, les investisseurs étrangers ont gelé leurs investissements, etc. C'est pour ça que je n'arrête pas de crier qu'il faut être complètement autonome et ne pas dépendre des autres. Mais j'ai vu dans les yeux des jeunes que j'accompagne hier : ouf, on va pouvoir reprendre le chemin vers cette liberté qui était la nôtre.
Et capitaine, parce qu'ils m'appellent comme ça. Certains m'appellent maman. D'autres m'appellent capitaine. Mais va remettre l'énergie dont on a besoin. Et là, je me rends compte qu'effectivement, ils n'ont besoin que de ça, peut-être, pour continuer ce cheminement, ce parcours tortueux qu'on est en train de prendre vers cette indépendance que l'on souhaite et cette dignité retrouvée pour ces jeunes et que je ne leur apporte pas. Ce n'est pas moi qui leur apporte, c'est eux qui vont le chercher avec moi. Et c'est ça qui est formidable. Mais cette impulsion, peut-être, que je donne révèle chez eux leur plein potentiel. Et là, ils sont capables de faire des trucs absolument formidables qu'ils n'imaginaient même pas eux-mêmes. Et ça, c'est aussi l'histoire de ma vie. En fait, j'ai passé mon temps à faire des choses que je ne pensais pas pouvoir faire et ne pas savoir faire.
Jean-Philippe Courtois :
Oui. C'est super que tu puisses le transmettre. On en reparlera tout à l'heure. Mais j'aimerais qu'on fasse un petit passage par ton moment dans les médias. Alors que ton entreprise est en cours de liquidation, tu commences une carrière à la télé. Alors, ce que j'aimerais savoir, c'est est-ce que cette expérience, cette présence à l'écran, a changé la donne pour toi et de quelle manière ? Qu'est-ce qu'elle t'a appris d'essentiel que tu utilises aujourd'hui ? Et qu'est-ce que tu n'as peut-être pas aimé non plus ? Parce que, voilà, il y a peut-être un arrière-décor qu'on ne connaît pas, quand on est spectateur, on voit ça, de ce qui se passe. Quels sont les beaux moments, ce que tu en as retiré, qui t'aident aujourd'hui, puis peut-être des choses un peu moins agréables ?
Hapsatou Sy :
Écoute, la télé, ça a un impact unique. C'est absolument formidable et jamais je ne vais renier ce que ça m'a apporté. Ça a été un bouleversement dans ma vie. Du jour au lendemain, ta marque, elle est connue d'un plus grand nombre. Ce pour quoi tu te bats au quotidien est accéléré. Et ça a été d'ailleurs l'un de mes problèmes, c'est que tout a été accéléré trop vite. Je n'ai pas su maîtriser la croissance. Je n'ai pas su bien m'entourer et je n'ai pas su m'entourer de meilleurs que moi à ce moment-là. Parce que je ne savais pas comment apprendre tout ça en même temps. Mais la télévision a cet impact fou, c'est de mettre en lumière peut-être ton histoire, ton parcours, et de faire en sorte que ça puisse toucher des gens qui vont adhérer à ce que tu fais.
Moi, j'ai connu la belle télé à l'époque du Grand 8, avec Laurence Ferrari, Roselyne Bachelot, Élisabeth Bost, Audrey Pulvar. C'était super. On a connu une télé empathique, une télé où on parlait vraiment aux gens. Et puis après, j'ai découvert cette télé que je n'aime pas. Cette télé où tu perds cette authenticité. J'avais rencontré Philippe Labro à l'époque, qui m'avait dit que le seul moyen de durer en télé, c'est d'être vrai. Et je crois qu'il a raison. Il y a beaucoup de gens qui se perdent dans ce milieu de la télé et qui croient être ce qu'ils ne sont pas en réalité.
Et donc moi…
Jean-Philippe Courtois :
C'est toujours possible, selon toi, aujourd'hui, en 2024, d'être vraie à la télé ?
Hapsatou Sy :
Écoute, moi, ça m'a coûté.
Jean-Philippe Courtois :
Tu en vois certains qui sont vrais ?
Hapsatou Sy :
Moi, ça m'a coûté. Ça m'a coûté d'être vraie, mais je ne renierai pas ça. Je resterai authentique. Et je crois que c'est aussi pour ça que j'ai une grosse communauté qui adhère à ce que je suis aujourd'hui. C'est que j'ai toujours été vraie dans les difficultés, comme dans les super bons moments. Il faut savoir rester humble parce que si tu existes à la télé, c'est juste parce qu'il y a des gens qui te regardent, mais ce n'est pas parce que tu es supérieur, ce n'est pas parce que tu es au-dessus des gens. Tu es juste derrière un écran, et les gens te donnent de la force en te regardant. Et ça, je crois que les gens l'oublient, et ils pensent qu'ils se sont faits tout seuls, et qu'ils sont devenus des stars de la télé comme ça. Non, pas du tout, en fait. Sois reconnaissant, sois humble, ça, c'est essentiel.
Mais dans mon business, effectivement, ça m'a beaucoup apporté. Et en même temps, c'est difficile, parce que quand tu as des difficultés, quand tu te plantes, quand tu te rates, tu as les lumières et les projecteurs dessus. Tu vois, moi, c'est ce que j'ai connu quand j'ai liquidé ma boîte. Il y avait des boîtes qui étaient liquidées bien plus grosses que la mienne, avec plus de collaborateurs, mais c'est moi qu'on voulait interviewer, et pas de problème, parce que moi, j'ai toujours témoigné sur mes réussites, comme mes échecs, et c'est ce que je dois à ma communauté. Ils veulent être entrepreneurs, je dois leur dire la réalité du terrain. Et donc, voilà, cette télé a été formidable, mais elle m'a coûté des combats très lourds, dont un que je viens de terminer, que je viens de gagner. Mais ça a été difficile.
Donc, du jour au lendemain, on te met au placard, et moi, je ne connaissais pas le fait qu'on me mette au placard, parce que j'ai toujours été patronne de ma propre vie. Donc, on ne me met pas au placard, si tu veux. Et de perdre, justement, cette liberté et ce contrôle, c'est pénible. Mais en même temps, c'est moi qui ai démissionné à un moment, en disant, je pars, parce qu'il y a un problème, en fait, et je ne veux pas être traitée comme ça. Donc, à la fin, ce qui compte, c'est ta dignité.
Jean-Philippe Courtois :
Tu as repris ta liberté, toujours. Tu as gardé ta liberté.
Hapsatou Sy :
Toujours.
Jean-Philippe Courtois :
Alors, j'aimerais qu'on revienne, justement, aussi à ces très belles initiatives que tu as, que tu as eues dans ta vie, au niveau entrepreneurial, notamment d'aider et encourager les femmes à prendre leur vie en main. Et j'aimerais que tu me parles un peu des « beautypreneurs ». Qu'est-ce que c'est que ce mouvement, si c'est un mouvement, d'ailleurs ? Je ne sais pas. Moi, j'aime bien voir les choses se métamorphoser, quelque part, en mouvement, avec des auto-entrepreneurs de leur vie. En quoi ça consiste ? Qu'est-ce que tu as pu réaliser, à ce jour, avec des beautypreneurs ?
Hapsatou Sy :
Alors, c'est devenu les lifepreneurs. Donc, entrepreneurs de leur vie. C'est la façon que j'ai trouvée de nommer ça. En fait, c'est une chaîne humaine absolument extraordinaire, aujourd'hui, en tout cas, elle l'est devenue. Parce que, par exemple, je commercialise du vétiver, une formidable tisane qui pousse au Sénégal, qui est cueilli par les femmes du Sénégal, donc qui leur donne un salaire, puis conditionnée par les jeunes du Sénégal, ce qui leur donne un salaire, arrive en France, et commercialisée par des femmes françaises, ce qui leur donne un salaire, et un complément de revenu. Et derrière, ça fait plaisir aux clients. Je trouve que cette chaîne est absolument formidable. Et c'est ça, être lifepreneur. En fait, lifepreneur, c'est justement ce dernier maillon. C'est des femmes qui sont à la maison, ou qui travaillent, qui peuvent être directrices d'agences bancaires. On a des directrices d'agences bancaires comme des personnes qui sont femmes au foyer, ce qui est un vrai métier. Voilà. Et en fait, elles vont effectivement organiser, tu sais, ces réunions Tupperware de l'époque, mais très modernisées, avec des thématiques de société. Elles discutent, elles échangent, et puis on va présenter nos produits, et elles vont les commercialiser et les vendre. C'est ça, être lifepreneur, mais c'est aussi avoir du soutien moral, mais aussi en termes de formation. Donc, c'est une académie de formation à l'année, gratuite, avec plein de speakers, d'intervenants. D'ailleurs, j'adorerais t'avoir en speaker.
Jean-Philippe Courtois :
Avec grand plaisir.
Hapsatou Sy :
Je sais que quand tu fais une demande en public, elle est plus facilement acceptée.
Jean-Philippe Courtois :
J'ai tendance à honorer mes demandes.
Hapsatou Sy :
Et puis ta générosité, elle est évidente. Donc, voilà, lifepreneur, c'est ça. À l'époque, j'avais, jusqu'avant mes difficultés que j'ai eues en télé, et ce harcèlement que j'ai subi, qui m'a conduit à un deuxième burn-out, d'ailleurs, je suis montée à 1200 lifepreneurs en 4 mois. C'était du jamais vu. Et aujourd'hui, je sors enfin de cette période qui a été difficile, avec ce procès interminable, qui se poursuit encore un peu, mais qui a été gagné. Et donc, là, je reprends je te donne rendez-vous fin d'année prochaine, et j'espère que j'aurai 2000 lifepreneurs, et que ça, ça va être formidable, parce que tu ne te rends pas compte, mais un jour, j'adorerais te montrer la réalité du terrain. Ces femmes, elles font un boulot extrêmement difficile de cueillette. C'est physique, avec l'enfant sur le dos, en pleine chaleur. Elles sont incroyables. Elles sont puissantes, elles sont fortes, elles sont dignes. Elles ne mendient pas, elles ne quémandent pas. Elles veulent le fruit de leur travail. Et derrière, ces jeunes comme ça, qui s'émancipent et grandissent à travers tout ça, c'est extraordinaire. Et ce projet ne peut pas être abandonné. Il ne peut que grandir. Voilà, c'est ce qui me stimule maintenant, moi. Et pour la première fois de ma vie, on ne me souhaite pas bon courage pour aller au travail. On me dira, « tu as trop de la chance ».
Jean-Philippe Courtois :
Je trouve vraiment intéressant ce que dit Hapsatou à propos des fêtes Tupperware. Certaines personnes les critiquent parce qu’elles renforcent les stéréotypes, mais d’autres disent que Tupperware a donné aux femmes le contrôle de leur vie. Quelle que soit votre position dans ce débat, l’aspect social est fondamental. Comme le dit Hapsatou à propos de sa propre entreprise, il s’agissait d’un environnement où les femmes s’entraidaient. C’était l’un des ingrédients du succès de Tupperware et c’est un modèle qui a été reproduit dans d’autres entreprises où les gens peuvent travailler à domicile et gérer leurs diverses responsabilités.
Jean-Philippe Courtois :
Alors, j'aimerais justement qu'on remette un pied maintenant dans le continent africain, puisque tu t'y trouves au moment de ce podcast. Et tu as plein de projets en Afrique, plein de choses qui ont démarré. J'aimerais que tu nous parles… il y a beaucoup de sujets, peut-être que tu choisiras. Il y a Green Tech, il y a Atypic Africa, et il y a Africa Myth. Donc, ça fait plein de choses. Est-ce que tu veux nous dire quelques mots et pourquoi tu t'es engagée sur ces projets ?
Hapsatou Sy :
Les trois projets de ma vie, et les trois sont liés. Green Tech, justement, c'est le leader français, mais le leader aussi à l'international, l'un des leaders internationaux des matières premières cosmétiques, pharmaceutiques et agroalimentaires, très engagé dans l'environnement et qui fait des choses absolument formidables. On a besoin d'expertise et on a su en trouver une partie, en tout cas. Chez Green Tech aujourd'hui, je représente la filiale Afrique de l'ouest de Green Tech. Atypic Africa, c'est ce qui chapeaute mes activités de concept store là-bas. Donc, on a des lieux absolument incroyables où tu as effectivement de l'artisanat, du commerce, tu as des industries créatives, etc. Le plus beau, il est à Mamel, à Dakar. Il fait 2000 mètres carrés. Il est absolument… C'est un peu nos Galeries Lafayette de la créativité, mais aussi de la transformation parce qu'on est en train de mettre en place un marché où on commercialise les produits issus de ces productions-là. Et ensuite, ça passe sur mon site internet où on va vendre toutes les créations. Et je suis ravie parce qu'Atypic Africa sera enfin à Maison et Objet, ce qui est une consécration pour nous cette année. Donc, on est contents parce que c'était un gros projet. Et le Myth, c'est un projet fou que j'ai lancé. La première édition a été difficile parce qu'il y a eu des événements politiques qui nous ont conduits à annuler. La deuxième sera meilleure et j'espère qu'on sera là dans dix ans parce que le Myth, c'est « make it happen ». Ça, c'est un projet qui est pour moi très important parce qu'on a identifié toutes les priorités du continent qui concernent les jeunes, les femmes, l'emploi, la santé, l'agriculture, l'entrepreneuriat, etc., et on en a fait un événement qui devait durer sur onze jours pendant lequel, justement, sous forme de hub comme ça, on a traité tous ces sujets-là à travers des masterclass hyper puissantes avec des speakers venus du monde entier, avec leur best practice et l'idée, c'était de partager, d'échanger, mais de concrétiser. Parce qu'il y a beaucoup d'événements comme ça, internationaux, ça parle, ça parle, et puis derrière, il ne se passe rien. Là, l'idée, c'est qu'on voulait créer 5 000 emplois à travers ce projet-là. Donc, l'édition 2 arrivera prochainement. Et pour l'instant, ce que vous voyez au sein d'Atypic Africa, en réalité, c'est le quotidien, c'est le Myth, mais au quotidien. Et le Myth, c'est un événement annuel. Voilà. Donc, je crois que j'ai bien synthétisé ou en tout cas, j'espère que vous avez compris.
Jean-Philippe Courtois :
Non, super. Et j'imagine que tu passes encore de plus en plus de temps en Afrique, compte tenu de cet écosystème que tu es en train de développer. J'aimerais maintenant, pour cette dernière partie un peu du podcast, Hapsatou, qu'on parle de leadership. Voilà. Parce que tu as eu tellement d'expériences différentes d'entrepreneuriat, dans les médias, dans la beauté, dans la coiffure, dans la… On a parlé un petit peu de ces chaînes de valeurs sociales, également en Afrique, en France. Mais ta vie, elle a été aussi marquée par des moments forts, par des succès, des échecs. Tu nous as confié un petit peu tes leçons. Et puis aussi des sauts en parachute, je sais qu’on en avait parlé… qui t'ont particulièrement…
Hapsatou Sy :
Tu dois venir !
Jean-Philippe Courtois :
Pas simplement marqué… mais absolument. Et puis, évidemment, la fierté de ton père pour ce que tu as réalisé et puis le courage de ta mère dont on tu as parlé. Donc, enfin, toi aussi, tu es devenue une maman. Et puis, à 40 ans, tu as décidé de t'émanciper complètement du jugement des autres. Après ces moments si forts, finalement, dans ta vie, quel type de leader es-tu, Hapsatou ?
Hapsatou Sy :
Oui, tu as raison. Je suis née le jour de mes 40 ans. J'ai décidé que l’avis des gens, c'était l’avis des gens. Mais, j'ai décidé de m'émanciper complètement de cette chose qui nous paralyse beaucoup dans nos actions, dans ce que l'on est. Et on est quelqu’un d'autre parce qu'il faut coller à ce que la société voudrait que l'on soit.
Jean-Philippe Courtois :
La conformité.
Hapsatou Sy :
Voilà. Être conforme. Non. Moi, je n'aime pas cette conformité. Et oui, j'ai effectivement décidé de m'émanciper du jugement des autres. Et depuis, je vis ma meilleure vie. Je vis ma meilleure vie. J'ai conscience que je ne suis pas parfaite. Je n'ai jamais considéré l'être. Mais encore plus, je peux être un être puissant comme un être faible et fragile parfois. Et je l'accepte pleinement et j'ai le droit de ne pas être maquillée, en jogging. Pas toujours sur mon 31 avec des talons de 12. Voilà. Parce que tu sais, cette société d'apparence t'oblige à toujours être parfaite. Voilà. Non. En fait, on a le droit d'être juste soi. Authentique et vrai. Et que ça plaise ou ça ne plaise pas, c'est le chemin que j'ai choisi en tout cas.
Jean-Philippe Courtois :
C'est un super chemin. Et donc, qu'est-ce que ça veut dire en termes de leadership et de leader ? Parce que tu es une leader, c'est évident, qui inspire des jeunes et pas que des jeunes, des familles, des communautés, on en a parlé. C'est quoi pour toi d'être une leader ?
Hapsatou Sy :
Être leader, c'est fédérer. C'est embarquer avec toi les gens. Ce n'est pas les porter sur ton dos. Ce n'est pas assister. Il ne faut pas confondre assistanat et accompagnement. C'est accompagner les gens vers la meilleure version d'eux-mêmes. Et en fait, je crois que quand tu décides justement de t'émanciper du jugement des autres, tu arrives face aux gens en étant puissant. Puissant dans le vrai sens du terme. Ça veut dire en étant juste toi-même. Et tu n'as pas peur de te tromper. Tu n'as pas peur de dire que tu n'as pas réussi. Tu n'as pas peur de dire aussi que tu réussis certaines choses. Mais tu as surtout conscience que la puissance du collectif n'équivaut en rien à cette puissance personnelle. Tu es quand tu es tout seul, mais tu es encore plus quand tu es ensemble avec d'autres en groupe. Et je crois que c'est ça le leadership. C'est quand tu comprends que même le sportif que tu vois tout seul sur le terrain, il n'est pas tout seul. Quand Nadal doit marquer la balle de match, il a son coach, il a ses supporters, il a son masseur, il a même ses adversaires si tu veux. Et donc, je crois que le leadership, c'est de comprendre tout ça à 360 et de dire, OK avec tous ces éléments-là, j'ai décidé d'avancer et j'aimerais avancer avec vous. Le qui m’aime me suive, il a ce côté un peu peut être arrogant. Tu vois, c'est comme ça. Ça veut dire tu ne fais pas de concessions. Or, quand tu vis dans le collectif, tu fais des concessions et tu acceptes d'arrondir les angles pour vivre ensemble. C'est ce qu'on appelle vivre en communauté avec les autres. Donc, je crois que le vrai leader, c'est celui-là. En tout cas, mon leadership à moi, c'est celui-là.
Jean-Philippe Courtois :
Absolument. Et si je rajoute un mot, un adjectif à ça… tu me vois venir évidemment, un leader positif ? Parce que comme tu sais, c’est le thème de ce podcast, c'est ce que j'essaye d'apprendre moi aussi depuis quelques années dans mes différentes vies professionnelles, associatives aussi. Tu m’as fait le grand plaisir d'être au jury du Prix Gabriel Live for Good il y a quelques mois déjà. Et on essaye de développer par beaucoup de travail personnel avec ces jeunes entrepreneurs, entrepreneuses, l'énergie positive qu'ils ont en eux pour finalement connecter leur mission personnelle avec un mouvement pour changer le monde. Voilà, je résume très, très simplement parce qu'il y a beaucoup de choses derrière. C’est quoi pour toi d’être un leader positif et comment tu le vis dans ta vie ?
Hapsatou Sy :
Moi, j'adore cette dimension de leader positif. Le leader positif, c'est le leader plus, plus, plus. Et c'est le leader plus les gens parce que s'il n'y a pas le plus les gens, tu es leader de rien. Tu fédères et tu n'emmènes personne.
Jean-Philippe Courtois :
Absolument.
Hapsatou Sy :
Le leader plus, c’est celui qui apporte sa pierre à l’édifice. Le leader plus, c’est celui va venir révéler. Alors, quand je parle de révéler, c'est révéler les personnes, mais révéler aussi l'environnement et ce que le monde nous apporte. Le leader positif, c'est celui qui veut faire les choses, mais bien. C'est-à-dire pas dans le but unique de s'enrichir, parce que tu peux t'enrichir pour réinvestir dans des projets qui sont top, mais c'est celui qui va impacter, c'est celui qui va créer de l'impact. Le plus, le mot impact est un vrai plus. C'est un leader qui va aller impacter son quotidien, le monde, les gens, l'environnement, etc. de manière positive. C'est ça un leader positif. C'est quelqu'un qui, parfois aussi, s'oublie, entre guillemets, pour faire exister ce collectif dont je parle et qui est tellement important. Voilà, pour moi le leader positif c'est tout ça. Je crois que c'est ce que tu es, parce que moi j'ai participé à ton initiative. Je sais que ce podcast c'est toi qui me poses les questions, mais je veux dire aussi la puissance des actions que tu portes, parce que justement tu as compris ce qu'était que ce leadership positif et c'est celui dont on a besoin. Pas que celui qui capitalise, capitalise, capitalise. C'est celui qui s'enrichit de l'impact qu'il crée.
Jean-Philippe Courtois :
Écoute, je te remercie surtout de m'inspirer, de nous inspirer avec tous nos auditeurs sur ce que tu fais parce que je pense qu'effectivement, si je t'ai choisi, ce n'est pas un accident, c'est parce que tu es un leader positif et que tu l'as démontré et que tu continueras à le démontrer. J'aimerais maintenant… On est vers la fin, Hapsatou, malheureusement ça va vite. Qu'on ouvre un petit peu un autre espace. Tu sais, on a tous des endroits, des espaces, des paysages, quelquefois des maisons, dans lesquelles on ressent profondément pourquoi on aime être sur cette terre. Alors si je te donnais le choix, c'est un mini-quiz entre trois maisons. Tu vas voir, il y a des références, je pense que tu connaîtras.
Celle où tu habites d'abord avec ta famille aujourd'hui. Ben oui, on a une maison, on habite avec sa famille. Premier choix.
Deuxième choix, une petite maison blanche avec des volets bleus dans la nature. Je crois que tu connais ça. Et le troisième, c'est une maison sans toit au Sénégal. Mais je sais que le toit, il a été mis ensuite parce que tu l'as mis pour ton papa. Quelle est la maison que tu choisirais et pourquoi ?
Hapsatou Sy :
Oh là là, ta question est trop difficile. Tu le sais en plus. Je ne peux pas choisir. La maison sans toit, c'est un chapitre de mon livre. Effectivement, je raconte. Mon père était si fier de me dire qu'il avait construit sa maison au Sénégal. Et le jour où je la visite, je sens sa fierté. Je lève la tête et je vois qu'elle n'a pas de toit parce qu'il n'a pas fini de la construire comme beaucoup de personnes qui partent à l'étranger et qui construisent step by step. Et je jure de tout faire pour finir de construire cette maison, chose que j'ai réussi à faire. Et ça, c'est pour moi une réussite, tu vois, c'est celle-là.
La maison aux volets bleus, c'est celle de Ryan Gosling dans ce film, le plus beau film d'amour qu'il existe, qui s'appelle N'oublie jamais. Si vous ne l'avez pas vu, c'est obligatoire de le voir. Et où, effectivement, à un moment frappé par Alzheimer, ce monsieur passe voir sa femme tous les jours qui ne le reconnaît plus. Et ses enfants lui disent, mais rentre à la maison maintenant. Et il dit, c'est elle mon chez-moi. Et ça, c'est le symbole fort de l'amour. C'est absolument extraordinaire. Donc, je vous souhaite tous d'avoir des maisons aux volets bleus. Et dedans, cette maison aux volets bleus symbolise la réalisation du rêve, la concrétisation du rêve. Et c'est cette maison aux volets bleus que j'ai eu la chance d'habiter un jour parce que je l'ai rêvé tellement fort que je suis allée m'asseoir dedans. Et cette maison avec mes enfants, avec ma famille, c'est évidemment la maison sans laquelle toutes les autres n'existent pas. Ça veut dire que c'est une maison où tu vois, si t'es pas entouré d'amour, t'es nulle part. T'as pas de maison en fait. Tu peux être dans un sublime château s'il n'y a pas l'amour, t'es nulle part. Voilà. Et c'est ça ces maisons-là.
Vient s'ajouter maintenant une dernière maison, c'est celle au village à Orcadières où j'ai été accueillie. Je l'ai postée sur mes réseaux sociaux et là, l'accueil a été tellement humain que ça te rappelle d'où tu viens. Et que surtout, l'amour du prochain, c'est ça.
Jean-Philippe Courtois :
C'est superbe. Je ne sais pas si on trouverait ces différentes maisons dans ton cahier des rêves. J'aimerais qu'on y revienne avant la fin, avant ma toute dernière question. Qu'est-ce qu'on trouve sur ton cahier des rêves aujourd'hui ? Si tu peux le partager.
Hapsatou Sy :
Bien sûr.
Jean-Philippe Courtois :
Parce que c'est très privé, très personnel.
Hapsatou Sy :
Écoute, à l'époque déjà, j'avais collé… je te raconte l'anecdote rapidement, mais un chèque d'un million d'euros à l'ordre de moi-même. Et j'avais juré qu'un jour j'aurais un million d'euros sur le compte bancaire de ma société. Chose que j'ai réussi à faire. Parce que pour moi, la levée de fonds, c'était tellement éloigné de ce que j'avais appris à faire dans ma vie, que c'était inatteignable. Donc ça, c'était un des trucs que j'avais collé, qui était au-dessus de mon bureau et dans mon cahier des rêves. Mais dans mon cahier des rêves aujourd'hui, je rêve vraiment de développer ces projets à impact que je porte. Parce qu'ils impactent la vie de tellement, tellement de personnes. Et que quand je vais ensuite dans les villages rencontrer les gens, je me rends compte de ce pour quoi je travaille. Et donc, c'est d'arriver à cet objectif de 5000 emplois. 5000 emplois, c'est 5000 familles qui changent et dont le quotidien change. Ça, c'est en gros dans mon rêve. Et puis, c'est clairement d'avancer. C'est peut-être complètement utopique, etc., mais dans un monde plus juste. Un monde où, effectivement, des jeunes qui sont nés au Sénégal ont autant de chance que des jeunes nés à New York ou nés à Paris. Et ça, j'y crois fortement parce qu'ils n'ont pas moins de potentiel. Ils n'ont pas moins d'intelligence. Ils ont beaucoup de résilience, voire plus. Donc, je rêve de changer les choses. Dans mon cahier des rêves, il y a beaucoup de changements. Sauf dans ma vie familiale où je souhaite que le bonheur et l'amour persistent. Et les discussions avec mon père persistent quotidiennement.
Jean-Philippe Courtois :
C'est superbe.
Ma toute dernière question pour cet épisode qui est très fort dans lequel on entend les voix de ton père, de ta mère, de ta famille. Ça revient toujours. Tu es aussi une maman. Tu es une maman très visible et active. Avec plein de succès, plein de rêves. Tu nous as ouvert ton cahier. Mais je pense que ce n'est pas forcément facile à porter avec des enfants et une famille. Alors, ma dernière question, c'est qu'est-ce que tu diras à Abby et Isaac lorsqu'ils seront un peu plus grands et qu'ils se poseront des questions sur le sens de leur vie finalement ? Ça sera quoi ton message ? Ça sera quoi ton appel peut-être au quotidien de maman vers Isaac et Abby ? Tu leur diras quoi ?
Hapsatou Sy :
Maman a fait tout ce qu'elle pouvait pour que vous ayez pleinement conscience que la liberté n'a pas de prix. Et tout ce que maman a réalisé aujourd'hui, c'est grâce à la conquête de sa liberté.
Jean-Philippe Courtois :
La liberté n'a aucun prix. C'est un message très inspirant à partager avec ses enfants et c'est aussi un appel à l'action pour tous les autres. Vous contrôlez votre destin, quelles que soient vos origines ou votre éducation. Vous pouvez réussir selon vos propres conditions si, comme Hapsatou, vous cultivez la force de votre caractère et la détermination nécessaire pour y parvenir.
Je m'appelle Jean-Philippe Courtois, vous avez écouté le podcast Positive Leadership. Si vous avez apprécié cet épisode, merci de nous laisser un commentaire ou une note de 5 étoiles. Rendez-vous sur ma page LinkedIn et inscrivez-vous à ma newsletter mensuelle gratuite Le Leadership Positif et vous. Merci d'avoir écouté et à bientôt.